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quinta-feira, 13 de outubro de 2011

L'évocation des morts-Charles LANCELIN

 

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Charles LANCELIN

L'évocation des morts

Les sept voies d'intercommunication entre les deux humanités

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A Madame la Baronne L. de Watteville

En très respectueux hommage de l’auteur

Ch. Lancelin


INTRODUCTION

On se figure généralement qu'il n'y a, pour l'humanité de la terre désireuse d'entrer en communication avec l'humanité désincarnée, d'autre voie possible que le recours à la médiumnité soit personnelle soit étrangère... C'est là, une erreur profonde : il existe actuellement — car l'avenir nous en révèlera probablement d'autres — sept genres de procédés différents, pouvant être utilisés par quiconque, dans notre humanité vivante, veut se mettre en rapport avec une Entité astrale.

Dire que ces différentes voies sont d'une utilisation aussi facile les unes que les autres serait évidemment commettre une erreur grossière, mais, chose étrange, c'est peut-être la plus facile, la plus simple et la mieux à portée du premier venu, quel qu'il soit, qui est le plus généralement ignorée : je veux parler de la voie animique.

Quant aux autres, chacun en a entendu plus ou moins parler, et communément on sait leur existence tout en ignorant leur mode particulier de procéder.

Aussi nous a-t-il paru de quelque utilité de donner, en ce qui concerne chacune d'elles, quelques explications générales qui serviront à les mieux faire connaître.

Nous allons donc parler successivement de la voie animique, de la voie onirique, de la voie médiumnique, de la voie ectoplasmique, de la voie magnétique, de la voie magique et enfin de la voie mécanique.


Chapitre I - LA VOIE ANIMIQUE

C'est un truisme de dire que la loi morale, la loi supérieure à toutes les lois écrites, la loi qui nous ordonne d'éviter le mal et de faire le bien, est connue de chacun de nous ; cela est un fait évident pour tous, parce que chacun de nous possède comme un sens intime qui est précisément l'interprète de la loi morale et qu'on appelle la conscience. Qu'est la conscience ? C'est le sentiment que nous avons de la moralité de nos pensées et de nos actes.

J.-J. Rousseau l'a magnifiquement définie dans son Emile, lorsqu'il s'écrie : « Conscience ! Conscience ! Institut divin, immortelle et céleste voix, guide assuré d'un être ignorant et borné mais intelligent et libre, juge infaillible du bien et du mal, qui rends l'homme semblable à Dieu ! C'est toi qui fais l'excellence de sa nature et la moralité de ses actions; sans toi, je ne sens rien en moi qui m'élève au-dessus des bêtes, que le triste privilège de m'égarer d'erreurs en erreurs à l'aide d'un entendement sans règle et d'une raison sans principes. »

Donc, chacun de nous se rend compte qu'il possède une conscience et que cette conscience lui est un guide assuré pour fuir le mal et marcher vers le bien même les hommes dont on dit vulgairement « qu'ils manquent de sens moral et n'ont pas de conscience...» C'est là une erreur que rectifie Kant[1] : « Quand on dit qu'un homme n'a pas de conscience, on veut dire par là qu'il ne tient aucun compte de ses arrêts, car s'il n'en avait réellement pas, il ne s'imputerait aucune action conforme au devoir et ne s'en reprocherait aucune comme lui étant contraire. Le manque de conscience n'est donc pas l'absence de la conscience, mais un penchant à ne tenir aucun compte de son jugement. » Or, toujours la conscience veille en chacun de nous.., tant pis pour qui n'écoute pas sa voix !

Mais qui donc fait entendre en nous ces avertissements intérieurs, ces cris intimes, si nettement impératifs et qui nous disent : Tu fais le mal !... D'où vient que nous sentons au plus profond de notre être un tribunal intérieur qui nous condamne plus sûrement que tous les juges de la terre ?

Car enfin, l'homme est faible et faillible ; son intelligence est bornée ; ses sens sont trompeurs et, pour employer les termes mêmes de J.-J. Rousseau, « son entendement est sans règle et sa raison sans principes... » Alors, quoi ?

Il est de la dernière évidence que l'erreur humaine ne peut créer l'infaillibilité conscientielle. D'où donc provient cette infaillibilité sinon de l'extérieur, et qui est-ce qui la cause ?

Il existe, dans l'enseignement catholique, une théorie très belle quoique légèrement déformée, d'après laquelle à chacun de nous est attaché un « ange gardien » qui veille sur la créature confiée à ses soins, sans jamais l'abandonner dans ses pires excès, toujours prêt à la retirer des abîmes, toujours prêt à lui enseigner la voie qui conduit aux sommets.

Cette théorie, qui est communément reçue et enseignée, n'a malheureusement aucune base dogmatique, mais elle répond merveilleusement au besoin intime qu'éprouve l'être humain de se sentir soutenu divinement au cours de ses multiples épreuves terrestres. Son manque de fondement doctrinal fait qu'on peut, qu'on doit la regarder comme le résultat christianisé d'une « fuite » de l'enseignement mystérial des vieux sanctuaires, provenant en premier lieu de l'indiscrétion de quelque initié aux Grands Mystères, et ensuite reprise et développée par les hautes philosophies de l'antiquité : Platon, entre autres, a plusieurs fois affirmé cette idée issue des enseignements mystériaux, et Socrate, intimement convaincu que chaque être humain est guidé, dans la vie, par un Génie supérieur, appelait daimôn, ce génie de qui la voix, confondue par l'homme avec celle de sa conscience, entraîne avec lui quiconque sait l'écouter et conformer sa conduite à ses inspirations, vers les plus purs sommets de la vérité, de la science et de la morale, vers l'idéal absolu, vers Dieu. Or Platon et Socrate étaient des initiés.

Nous savons, en effet[2] qu'à chacun de nous sont attachées des Entités astrales ayant mission de nous guider, de nous faire progresser dans la voie du bien qui doit nous conduire aux plans supérieurs du Cosmos pour, plus tard, atteindre le plan divin.

Ce sont ces Entités du plan astral qui nous parlent par la voix de notre conscience, et c'est leur impulsion, dans l'intimité de notre être, qui nous écarte du mal pour nous faire progresser vers le bien. C'est donc par la conscience que, sans s'en douter, chacun de nous entre en communication avec les êtres qui ont vécu, comme nous aujourd'hui, de la vie terrestre, et qui, plus évolués que nous, ont maintenant charge de nous guider dans la voie de l'évolution morale.

A qui, en effet, n'est-il pas arrivé, se trouvant dans quelque occurrence critique ou simplement douteuse, de songer à un parent, à un ami défunt qu'il sait avoir vécu selon la norme de la justice et qu'en conséquence il regarde comme plus évolué que lui-même, et de se demander : « Que ferait-il dans la circonstance présente, où je me trouve indécis de savoir où est le bien, où est le mal ? » Or, pendant que son anxiété interroge l'être disparu, c'est sa conscience qui lui répond : « Voilà ce qu'il convient de faire ! » Et sa conscience, j'entends la conscience pure, la conscience qui n'a pas été sophistiquée ne trompe jamais.

Car la conscience d'un être peut être alambiquée, affaiblie et faussée par la malice et la faiblesse humaines et c'est encore une preuve que, si notre conscience est dans notre intimité, ses ressorts nous sont extérieurs.

En effet, les moralistes ont, avec raison, enseigné certaines divisions de la conscience qui n'est pas la même chez tous les hommes. Dans la conscience générale, ils ont donc trouvé : la conscience vraie, la conscience droite, qui juge conformément à la loi ; la fausse ou erronée, qui s'en écarte ; la sectaire, qui juge sans crainte de se tromper ; la probable, qui juge sur de simples vraisemblances ; la douteuse, qui est combattue par des raisons d'égale force ; la large ou facile, qui juge sur de légers motifs favorables ; la scrupuleuse, qui se crée des motifs futiles de crainte et n'ose se décider et enfin l'ignorante, qui n'interdit pas le mal uniquement parce qu'elle n'a aucune connaissance du bien.

Chacune de ces dispositions particulières, chacun de ces différents degrés de la conscience abstraction faite, naturellement de la conscience droite, de la conscience certaine, qui sont régies par des Entités venues de l'Astral, et de la conscience ignorante qui est celle de l'enfant encore sans intelligence provient de la méchanceté ou de l'infirmité humaines. Trop souvent, l'homme agit contre sa conscience, et, à la longue, la conscience se trouble: en d'autres termes, la voix des Entités supérieures perd de son autorité persuasive simplement parce que l'habitude est prise de la repousser : l'homme en arrive à confondre l'ordre de sa passion avec l'ordre de sa conscience et, s'il n'a pas la force de réagir, sa conscience devient fausse, ou, pour mieux dire, en quelque sorte aphone: elle parle toujours, mais il ne l'entend plus parce qu'il a d'abord refusé de l'entendre ou, comme l'a dit J.-J. Rousseau : « a la conscience se rebute à force d'être éconduite ; elle ne nous parle plus, elle ne nous répond plus...»

Dès lors, l'homme ne se dirige plus que par des mobiles passionnels uniquement pour ce motif qu'il a donné depuis longtemps la prédominance à sa passion et que maintenant il en est arrivé à prendre sa passion pour sa conscience. Mais alors, qu'il fasse un énergique effort pour se libérer de soi-même, et les Entités amies, qui ne l'abandonnent jamais, si bas soit-il tombé, se feront entendre de nouveau au plus profond de son être... pour lui apporter quoi ? L’obsession du remords d'abord, et plus tard, le repentir qui expie, qui rachète et qui répare.

Les anciens avaient parfaitement compris cette cause des remords, extérieure au coupable et le flagellant d'indestructibles lanières ; ils disaient en effet dus coupable exaspéré de ses tourments à Athènes : Ce sont les Erinnyes qui le poursuivent ! Et, à Rome : Il est en proie aux Furies !

Il n'est aucun criminaliste, aucune police au monde qui ignore ce phénomène caractéristique et primordial qui se manifeste immanquablement chez tout criminel : la conscience aiguë et torturante du forfait criant chez son auteur l'obsédant besoin de revoir le lieu de son crime, et bien que plus rarement le poussant à se livrer, pour en finir, à la justice humaine.

Cet inéluctable, cet infrangible besoin de revoir le lieu où il fut criminel, peut-on raisonnablement soutenir qu'il prend son origine dans le cœur de Monime lui-même ? Non, non ! Il est l'indéniable résultat d'une force étrangère, et cette force a sa source sur le plan astral. S'il en était autrement, aucun assassin, obéissant au suprême instinct de la conservation, ne commettrait ce geste inutile et imprudent qui, neuf fois sur dix, le livre à la justice. Or, que l'on ne s'y trompe pas : la conscience meut l'homme, mais elle est elle-même mue par des Entités plus puissantes que l'homme, et ce sont ces Entités supérieures qui indéniablement créent le remords chez le criminel.

Le remords ! Ecoutez cette page où Chateaubriand[3] le décrit d'une plume impressionnante : « Chaque homme a, au milieu du cœur, un tribunal où il commence à se juger soi-même, en attendant que l'arbitre souverain confirme la sentence. Si le vice n'est qu'une conséquence physique de notre organisation, d'où vient cette frayeur qui trouble le jour d'une prospérité coupable ? Pourquoi le remords est-il si terrible qu'on préfère souvent se soumettre à la pauvreté et à toute la rigueur de la vertu plutôt que d'acquérir des biens illégitimes ? Le tigre déchire sa proie et dort; l'homme devient homicide et veille. Il cherche les lieux déserts, et cependant la solitude l'effraie ; il se traîne autour des tombeaux, et cependant il a peur des tombeaux. Son regard est inquiet et mobile ; il n'ose fixer le mur de la salle du festin, dans la crainte d'y voir des caractères funestes. Tous ses sens semblent devenir meilleurs pour le tourmenter; il voit, au milieu de la nuit, des lueurs menaçantes; il est toujours environné de l'odeur du carnage; il découvre le 'goût du poison jusque dans les mets qu'il a lui-même préparés ; son oreille, d'une étrange subtilité, trouve le bruit où tout le monde trouve le silence et, en embrassant son ami, il croit sentir un poignard caché sous ses vêtements. »

C'est ce que, avant lui Michel Montaigne avait résumé en deux lignes d'une admirable énergie : « La malice s'empoisonne de son propre venin. Le vice laisse comme un ulcère en la chair, une repentance en l'âme qui toujours s'égratigne et s'ensanglante elle-même[4].» Mais, dans ces deux lignes, Montaigne ne voit que le fait brutal, dont la cause lui échappe.

Or, pour quiconque recherche cette cause, il est indéniable qu'elle n'est pas en nous et ne se rencontre que dans un monde extérieur au nôtre, dans un monde supérieur au monde terrestre. Dufieux a dit quelque part: La conscience, c'est Dieu en nous... Non ! Dieu est trop grand et nous sommes trop petits ; il est trop haut et nous sommes trop infimes ; mais on peut dire, en toute assurance que la conscience, c'est le représentant de Dieu en nous. Et qui est ce représentant, sinon l'être humain désincarné, évolué, plus intelligent, par suite, et plus puissant que nous, à qui l'Egrégore, ministre médiat lui-même de la Divinité, a confié le soin de nous suivre dans la vie pour nous rapprocher de lui dans la mort ?

Pour que l'on ne s'y trompe pas : notre conscience est, en nous, le porte-parole de nos morts, et il nous est loisible, à tout instant, de nous entretenir avec nos chers disparus... En vain l'orgueil humain s'écrie : La conscience, c'est l'homme ! Non, si la conscience était l'homme lui-même, comment pourrait-on expliquer que l'homme fût si souvent en désaccord avec sa conscience et que si souvent aussi, hélas ! Il agît contre elle ? La conscience, cela a été dit plus haut mais ne saurait être trop répété, la conscience est soumise à une force extérieure qui est celle de notre génie de notre guide, disent les spirites — et notre génie laisse nos morts nous parler quand leurs enseignements nous peuvent être utiles.

Comment cela se fait-il ? Voici :

Le souvenir est le lien qui unit l'humanité incarnée à l'humanité désincarnée. Lorsque, sur terre, nous pensons à quelqu'un de nos chers disparus non pas légèrement et en passant, mais profondément et en les appelant passionnément, dans l'intimité de notre être, notre souvenir, ainsi fortement affirmé, crée dans l'astral, ou pour parler plus scientifiquement, dans l'éther[5], une série de vibrations s'étendant instantanément autour de nous et se diffusant dans le cosmos entier car, en quelque point de l'univers que se trouve l'être vers qui va l'affection de notre souvenir, il est touché par les vibrations mentales que nous émettons, et il accourt aussitôt à notre appel.

Alors, enveloppé de notre affection terrestre, il nous enveloppe à son tour de son affection spiritueuse ; alors notre esprit le voit plus clairement, plus distinctement que nos yeux de chair ne l'ont jamais vu sur terre ; alors, il se réfugie en nous comme nous nous réfugions en lui, et c'est, dans le triple secret de la conscience, dans l'impénétrable intimité de nous même, une ineffable conversation, un mystérieux entretien de deux êtres n'ayant de commun entre eux que les souvenirs du passé scellés dans la mutuelle affection qui les unit et c'est le vivant terrestre qui, écrasé par la dureté des hommes et l'inclémence des choses, demande au vivant supraterrestre, plus clairvoyant que lui-même, de lui alléger le fardeau de ses épreuves en ce monde, de le conseiller dans ses doutes et de le guider dans ses ténèbres, tandis que le frère astral, qui comprend mieux encore que son frère terrestre le besoin des appuis divins, lui demande le secours de ses pensées et de ses prières... Qu'il est superbe alors, cet ineffable rôle de la conscience qui, dans un colloque souverainement mystique et dans une indicible communauté de sentiment, réunit pour un instant le passé avec le présent, l'affection terrestre avec l'affection psychique, l'homme de la matière avec l'Entité des espaces, le plan physique avec le plan astral, la Vie qui peine avec la Mort qui pense !

Et cette voie de communication entre deux mondes est qu'on ne l'oublie pas ! Ouverte à tout instant et pour chacun de nous et non seulement l'être humain y peut évoquer l'Entité astrale, mais encore celle-ci peut s'y révéler d'elle-même et sans être appelée, pour peu qu'elle ait une pensée utile à suggérer.


Chapitre II - LA VOIE ONIRIQUE

A cette voie de la conscience se rattache celle du songe[6] qui n'en est que le développement, puisque le songe lui-même n'est que la résultante d'un état particulier de la conscience qui se continue dans le sommeil, jusqu'au point de s'objectiver parfois avec toutes les apparences de la réalité.

On peut définir le phénomène onirique en général songe ou rêve : un ensemble étonnant mais presque toujours incohérent de figures, d'idées, d'images qui se présente à notre esprit durant le sommeil.

Maine de Biran en a donné une théorie qui est a retenir. « Le sommeil, dit-il[7], se produit dès qu'il y a une concentration des forces sensitives et motrices dans l'organe cérébral, concentration qui tend à affaiblir peu à peu les communications sympathiques de ce centre avec les parties qui lui sont soumises et à ôter ainsi au centre moteur son empire et aux organes mobiles leur obéissance. Puisque la volonté se retire pendant le sommeil, il n'y a plus, dans l'entendement, qu'une faculté passive de sentir ou de recevoir des impressions et d'en être affecté ; d'éprouver, par suite des dispositions naturelles ou acquises des organes, certains appétits ou penchants ; d'avoir les intuitions et les images des objets relatifs à ces appétits; de réaliser ces images au dehors de se les représenter dans un certain ordre d'association nécessaire ou accidentel... » D'après cette théorie, qui semble très juste, les phénomènes se produisant durant le sommeil s'expliquent par la suspension momentanée de la volonté et l'affaiblissement de la puissance d'attention.

Donc, pendant le sommeil, l'être se trouve dans un état presque complet d'inertie et de passivité, c'est-à-dire dans les conditions absolument requises pour que les Entités du Mystère puissent venir le trouver et entrer en conversation avec lui[8]. C'est dire qu'en telle occurrence, l'intercommunication est très aisée ; mais seulement pour l'Entité astrale qui, trouvant l'être humain passif, peut réagir sur son attention à laquelle elle s'impose.

A quoi tiennent l'incohérence, la bizarrerie et l'inconséquence des rêves ? Très vraisemblablement à ce que l'association des idées ne s'opère pas d'après les lois de la logique, de la raison, mais suivant des analogies de toute espèce, analogies de sons, de temps, de figures, etc. L'ordre n'est pas arbitraire, mais, au lieu d'être réglé sur un mobile déterminé, sur un but vers lequel la volonté dirige toutes les idées, il s'établit de lui-même : ceci, dans le rêve; mais dans le songe, il est établi par l'Entité directrice, laquelle conduit le développement de ce même songe avec une logique, avec une lucidité parfaites, de façon à le mener pas à pas jusqu'à son aboutissement voulu. Tantôt il est simplement dirigé par cette même Entité, de manière à nous donner un avertissement, un enseignement particuliers c'est alors le songe monitoire, dont il existe tant d'exemples et tantôt l'Entité se révèle elle-même pour donner plus de force à sa parole et nous frapper davantage, et alors c'est l'intercommunication dans son absolu, avec cette différence, toutefois : c'est que, par suite de son état de passivité, l'être humain qui est l'objet de cette manifestation est généralement hors d'état de discuter avec l'Entité présente et doit se borner à recevoir les préceptes qu'elle est venue lui donner.

Cette croyance à la signification supra-normale de certains songes ne date pas d'hier : aussi haut que nous pouvons, remonter dans le passé, nous la trouvons établie. Les Grecs les regardaient soit comme des communications de la Divinité (chrêmatismos), soit comme des visions des choses futures (orama) et cette idée a régné en maîtresse chez tous les peuples anciens, en Egypte, en Judée, aux pays d'Assur et de Babylone, en Perse, à Rome, etc. Elle a été acceptée par tous les grands esprits de tous les temps : Platon explique la vue que l'âme peut avoir en songe des choses futures parce qu'il la suppose alors moins soumise à l'influence du corps ; Xénophon partagea cette opinion, et aussi Socrate, semble-t-il bien ; Cicéron la développa dans son « de senectute », et on la retrouve chez Montaigne, Pasquier, Franklin, etc. Ne voit-on pas d'ailleurs, dans le plus grave de tous les livres, dans l'Evangile, Marie et Joseph avertis par un songe qui les fait fuir en Egypte, et la femme de Pilate faire part à son mari du songe prémonitoire qu'elle vient d'avoir touchant le Christ lui-même ?

Certes il ne faut faire aucune confusion entre les songes sérieux qui sont envoyés et dirigés par des Entités astrales, où parfois elles se manifestent elles-mêmes pour leur donner plus d'autorité, et les rêves capricieux et désordonnés dont la fausse science appelée Onirocritie explique avec emphase toutes les futilités, toutes les inepties, toutes les absurdités-les plus biscornues... Les rêves sont un effet de notre imagination subconsciente, de nos souvenirs latents, de l'état momentané de nos organes ou de notre ambiance physique : ils ne méritent aucune attention ; mais il n'en est pas de même des songes prémonitoires dont, je le répète, il existe autour de nous d'innombrables exemples, et surtout de ceux, bien que plus rares, où nous entrons en communication avec nos aimés de la terre, passés de l'autre côté du voile et revenant s'entretenir avec nous...

A qui de nous, en effet, n'est-il pas arrivé de voir en songe quelque parent ou ami défunt, de converser avec lui comme de son vivant, et de lui demander quelque conseil sur l'objet de ses préoccupations du moment ? Le songe est, en ce cas, comme l'épanouissement d'un souvenir intime qui semble profiter de l'engourdissement où le sommeil jette notre organisme, pour prendre corps et revivre, devant notre regard interne, avec tout le relief d'une réalité rénovée.

Mais, justement parce que le songe n'est, en quelque sorte, dans ces conditions, qu'une objectivation factice et momentanée de la conscience, il suffit de signaler cette voie qui, bien qu'elle en semble différer, rentre absolument dans ce qui vient d'être dit de la voie conscientielle avec une différence capitale, cependant, qui est celle-ci : Il nous est loisible en tout état de cause et dans toutes les occurrences de la vie, de descendre dans notre for intérieur pour nous y recueillir et nous y entretenir avec nos chers disparus ; il nous est impossible de faire naître nos songes ; tout au plus pouvons nous, par un ardent désir, créer un milieu mental propice à leur développement... mais cela est si rare[9] !

Toutefois, il m'est permis de donner à cet égard une indication, peut-être bien fruste, mais qui pourra être de quelque utilité.

Au cours d'un ouvrage précédent[10] j'ai eu, en vue de produire, en cours de sommeil, le dédoublement de l'être, à étudier de façon quelque peu approfondie les conditions psychologiques où se trouve l'homme qui dort, et, en suite de cette étude, j'ai été amené à établir cette conclusion: Le sommeil est une période caractérisée par le repos des organes qui servent à la vie de relation, et par un redoublement d'activité dans les fonctions de la vie intérieure; c'est ainsi que durant cette période, les sens demeurent inertes, mais les fonctions physiologiques internes (digestion, etc.) s'accomplissent avec plus de rapidité que dans l'état de veille. Or, ce qui est vrai au point de vue physiologique l'est également au point de vue psychologique : la volonté s'obnubile, mais la mémoire subsiste : elle peut donc recevoir, pendant la veille, les ordres de la volonté et les conserver pour les transmettre à l'organisme pendant le sommeil.

Ceci est exact pour arriver à la réalisation du phénomène de dédoublement alors, étudié ; mais il faut remarquer qu'ici, pour ce qui touche le phénomène d'une apparition onirique, deux volontés doivent être mises simultanément en jeu, celle de l'être humain qui veut être l'objet de la vision et celle de l'Entité astrale qui la doit réaliser ; si donc la volonté de cette dernière ne se manifeste pas, le résultat obtenu par l'autre ne pourra être que nul.

Cette réserve faite, voici, à mon avis comment il convient d'opérer : Pendant vingt-quatre ou quarante-huit heures, s'astreindre à penser constamment, énergiquement à l'être invoqué; rappeler tous les souvenirs connus qui vous lient à lui, toutes les circonstances, futiles ou notables, où l'on s'est trouvé avec lui ; en un mot, arriver à créer en soi une ambiance mentale qui soit commune à l'un et à l'autre. Quand cette ambiance est enfin créée et que, par elle, l'opération est bien préparée, demander à l'Entité invoquée, avec la dernière énergie de volonté, qu'elle veuille bien se manifester la nuit suivante, au cours d'un songe; cette volonté ne doit pas être celle d'un enfant qui veut une friandise ou celle d'une femme qui veut un colifichet, mais celle d'un homme qui tombé dans une rivière et ne sachant pas nager, veut malgré tout ne pas périr: c'est dire que la volonté déployée doit être à la fois intense et constante; cette volonté, cette voulitodynamie, je l'ai expliqué ailleurs, crée autour de vous des séries continues de vibrations éthériques qui touchent, où qu'elle se trouve, l'Entité évoquée, et l'amènent près de vous ; depuis le moment où vous vous couchez jusqu'à celui où vient le sommeil, exacerbez encore si possible votre vouloir et votre supplication ; quand le sommeil est venu, la volonté ne peut plus agir, mais elle est alors remplacée par la mémoire qui continue son œuvre, et si la volonté de l'être appelé répond à la vôtre, le phénomène attendu se réalisera.

Dans ce cas, une condition utile à remplir, sinon nécessaire, consiste à s'endormir en tenant à la main un objet provenant de l'être invoqué (lettre, cheveux, etc.) ou lui ayant intimement appartenu et imprégné de son aura (bague, montre, etc.) un tel objet, en dirigeant la mentalité de l'appelant et en amenant celle de l'appelé, constituera en quelque sorte un trait d'union, à la fois matériel et psychique, entre les deux individus terrestre et astral, et contribuera fortement à produire leur rapprochement et, par suite, la vision onirique désirée.


Chapitre III - LA VOIE MÉDIUMNIQUE

Comme on vient de le voir, la voie animique ou conscientielle est ouverte à tous et suffit à tous pour entrer en communication avec les Entités du mystère; mais, pour beaucoup de personnes, la vanité humaine est digne de foi lorsqu'elle affirme avec quelle erreur ! Que la conscience n'est que partie constitutive de la personnalité, sans aucune communication avec l'extérieur et ces personnes, se figurant qu'une conversation dans l'intimité de leur conscience n'est qu'un débat avec elles-mêmes, un produit simplement de leur propre imagination, demandent, lorsqu'elles entreprennent de communiquer avec le Mystère, un procédé ne leur laissant aucun doute sur la réalité d'une Entité de l'astral correspondant avec elles-mêmes.

A ces personnes, la voie médiumnique est ouverte, mais beaucoup, même à l'heure actuelle, ne se doutent pas que cette voie est trop souvent moins sûre que celle de la conscience et que, lorsqu'en l'utilisant elles se figurent être devant un pan soulevé du voile mystérieux, où elles croient jeter leur regard sur l'infini, elles ne se trouvent en réalité souvent que comme devant un miroir qui ne fait que refléter et leur renvoyer leurs propres pensées.

En effet, lorsque, il y a quarante ans, A. Aksakoff publia Animisme et Spiritisme[11] d'abord en Russie, puis plus tard en Allemagne, et enfin en France, les spirites rapportaient indistinctement aux Esprits tout phénomène leur paraissant supranormal, quoi que leur en dissent à cet égard les occultistes[12]. Aksakoff jeta quelque désarroi dans les idées reçues en prouvant scientifiquement, dans l'être humain, l'existence de certaines forces ignorées de la physiologie et générant, dans la réalité, des phénomènes rapportés jusqu'à lui à l'indéniable action des Esprits. Depuis lors les progrès de la psychophysiologie et de la psychologie expérimentale ont complètement confirmé les théories d'Aksakoff.

Personnellement, j'ai maintes fois eu l'occasion de constater à quel point la suggestion mentale des assistants influe sur les médiums en transe, au point que je considère généralement leurs indications comme suspectes et comme ayant besoin d'être confirmées par d'autres voies.

Lors donc que ces personnes vont consulter un médium, elles se figurent que, immanquablement, la réponse donnée par ce médium ne peut émaner que de l'Entité qui le fait agir et parler, alors que, très généralement, elles apportent dans leur esprit la réponse qu'elles espèrent, qu'elles suggèrent mentalement elles-mêmes sans s'en douter au médium, de qui la réponse n'est, en ce cas, que la réalisation verbale de leur propre désir.

Donc la voie médiumnique, quoi qu'on en pense, est moins sûre que la voie conscientielle. Est-ce à dire pour cela qu'on doit lui refuser toute confiance ? Cette conclusion radicale est bien loin de ma pensée, pourvu toutefois que l'on opère prudemment et judicieusement, car il est indéniable qu'en chacun de nous existe une faculté particulière très rudimentaire chez les uns, au point d'en être presque nulle, plus ou moins développée chez la plupart d'entre nous et parfois, mais très rarement, atteignant chez quelques individus un degré d'épanouissement qui fait de son détenteur un être à part: je veux parler de la médiumnité.

Qu'est-ce que la médiumnité ? Si nous ouvrons le Larousse, nous trouvons : « Prétendue science des médiums ».

Au mot médium, nous trouvons : « Superst. — Etre animé ou inanimé qui passe pour servir de communication dans la production de certains phénomènes spirites. — Personne même qui passe pour servir d'intermédiaire entre le monde visible et le monde invisible. »

Littré est encore plus net : « Personne qui prétend servir d'intermédiaire entre ses semblables et les esprits des morts ou autres. »

Telle est l'explication donnée par des lexicographes qui ne savent rien de ces choses à des lecteurs qui en ignorent tout. D'autre part, des explications, sinon fausses, au moins inexactes ont été données par des intelligences pourtant averties de ces choses.

Je suis donc conduit à exposer ici une brève théorie des faits pour amener le lecteur à la compréhension exacte de ce qu'est en réalité cette faculté spéciale qu'on appelle la médiumnité.

L'être humain est tri-un, c'est-à-dire composé de trois principes, distincts entre eux et essentiellement différents les uns des autres, et qui sont :

A — L'esprit, qui génère les idées.

B — L'âme, intermédiaire plastique entre l'esprit et le corps, transmettant au second les idées générées par le premier.

C — L'organisme physique, réalisateur des idées.

L'âme elle-même n'est pas une, mais composée de sept éléments[13] dont chacun a sa forme spéciale et son rôle particulier à remplir et qui sont, en descendant :

1°. — L'âme conscientielle, siège du moi de l'individu.

2°. — L'âme intuitive, à qui l'esprit transmet les idées nées en lui.

3°. — L'âme morale, qui distingue le bien du mal.

4°. — L'âme causale, siège de la mémoire et de la volonté.

5°. — L'âme intelligente (appelée aussi corps mental), centre de la science humaine.

6°. — L'âme sensitive (appelée aussi corps astral) siège de la sensibilité.

7°. — Et enfin l'âme vitale (appelée aussi double aithéri­que ou corps odique) qui détient la vie matérielle de l'individu.

Chacune de ces sous-âmes possède sa forme particulière : c'est dire que chacune d'elles est douée d'une certaine énergie de forme et, par suite, de volume. Tout ceci ressort de mes expériences personnelles dûment contrôlées, et répétées, à l'heure actuelle, par d'autres expérimentateurs.

Les âmes supérieures se composent de substance presque spiritique dont d'ailleurs nous ignorons encore la nature — pour être en relation avec l'esprit.

Nous ne savons encore quelle substance constitue l'âme causale, qui relie les âmes supérieures aux trois suivantes.

Enfin, les trois âmes inférieures sont constituées par des éthers différenciés, c'est-à-dire par une substance fluidique presque matérielle pour pouvoir lorsqu'elle est suffisamment condensée, agir directement sur la matière. La substance des autres âmes est sans aucune action sur la matière, mais, par contre, la substance de l'âme sensitive se combine très facilement avec celle de l'âme vitale - la sienne ou celle d'un individu différent et, par le moyen de cet intermédiaire, normal ou occasionnel, possède un moyen indirect d'action sur la matière.

Or que se passe-t-il dans le phénomène de la mort ?

L'esprit, n'étant plus retenu dans son organisme usé, s'en sépare et remonte vers les plans supérieurs, entraînant avec soi son enveloppe normale, l'âme, elle aussi libérée. Mais l'âme n'est pas complète quand elle s'évade du corps défunt : elle délaisse la partie d'elle-même, l'âme vitale, double éthérique qui détient la vie physique et qui reste près du cadavre qu'elle ne peut plus animer et qu'elle suit elle-même dans la mort au bout de quelques jours.

Le fantôme du décédé n'est donc plus à base d'âme vitale comme celui du vivant, mais à base d'âme sensitive[14].

D'autre part, nombre d'êtres humains, surtout les nerveux, extériorent inconsciemment, avec leur énergie neurique, une partie plus ou moins grande de la substance qui constitue leur âme vitale et qui revêt alors deux apparences : soit, à l'état statique, une sorte de duvet lumineux couvrant les parties du corps dénudées bleuâtre à gauche et orangeâtre à droite, que le Colonel de Rochas appela des lobées ; soit à l'état dynamique, ces radiations spéciales qu'a souvent saisies la plaque photographique, qui s'échappent des yeux, de la bouche, des doigts, etc., et qu'on appelle rayons V (Darget) ou rayons N (Blondlot et Charpentier). Lorsque cette force substance éthérique est émanée en quantité suffisante pour pouvoir se condenser, elle constitue le fantôme des vivants maintes fois photographié, et dont les manifestations ont été aussi souvent étudiées et contrôlées que celles du fantôme des morts.

Or, réunissez ces deux phénomènes différents et combinez-les ensemble : d’une part, un vivant qui extériore en grande quantité sa force substance vitale, susceptible d'agir sur la matière organisée ou non et d'autre part, un être défunt basé sur de la force substance sensitive n'ayant par elle-même aucune action sur la matière mais apte à se combiner avec de la force substance vitale appartenant au vivant dont il vient d'être question, et qu'il trouve en face de soi. La réunion de ces deux phénomènes en un seul et les suites qui en découlent constitueront la série des phénomènes médiumniques, où, comme on dit aujourd'hui plus scientifiquement métapsychiques.

On appelle donc médiumnité la faculté spéciale que possèdent certains vivants d'extériorer leur force substance éthérique ou vitale en assez grande quantité pour que certains défunts puissent se l'assimiler momentanément et, avec son aide, agir sur la matière, que cette matière soit inerte, comme, par exemple, un meuble que l'Entité fera mouvoir ou craquer ; ou bien qu'elle soit vivante, comme l'organisme du médium qu'alors l'Entité fera agir ou parler. Par suite, le médium est l'être vivant, capable d'émaner sa force substance éthérique dans les conditions qui viennent d'être indiquées. On voit que la médiumnité n'est jamais l'indice d'un état pathologique, et que son abus seul, amenant une dépense de fluide vital, peut être une cause d'affaiblissement ; elle est plutôt d'ordre psychique que d'ordre physique, aussi doit-on éviter vis-à-vis des médiums, tout ce qui peut surexciter l'imagination. D'un autre côté, les diverses combinaisons de ces forces substances fluidiques différentes, dans telle ou telle proportion ou bien dans tel mode plutôt que tel autre, donne lieu plus facilement à certains ordres de phénomènes qu'à d'autres; on comprend, dans ces conditions qu'il existe une grande quantité de médiumnités bien distinctes entre elles par les effets qu'elles produisent et dont je vais examiner rapidement les variétés les plus répandues.

Je citerai tout d'abord les médiums à effets physiques, qui sont plus spécialement aptes à produire les phénomènes matériels ; mouvements de corps inertes, bruits, etc. ; ils sont conscients ou inconscients, et agissent avec ou sans leur volonté propre. Les classes les plus connus de ce genre de médiums sont :

A — les médiums typteurs qui produisent les coups frappés.

B — Les médiums moteurs, produisant les mouvements des corps inertes.

C — Les médiums à translation et à suspension, qui produisent le transport ou l'arrêt, dans l'espace, de corps inertes et sans point d'appui.

D — Les médiums à effets musicaux provoquant le jeu d'instruments avec ou sans contact.

E — Les médiums à apparitions et à matérialisations, provoquant des apparitions fluidiques plus ou moins matérialisées : visibles, audibles, tangibles... Il en sera plus loin question de façon spéciale[15].

F — Enfin les médiums à apports, amenant près d'eux ou créant de toutes pièces des objets matériels.

— Les médiums sensitifs, ou impressibles, ressentent la présence des Entités du Mystère par une vague impression, une sorte de frôlement aux mains et au visage, faculté qui n'a rien à voir avec la neuricité, car on la rencontre chez des sujets dont le système nerveux est fort peu délicat.

— Les médiums auditifs entendent la voix des Entités, mais de deux façons différentes : pour les uns, la voix, claire et distincte, frappe et fait vibrer leur tympan ; pour les autres, c'est un son particulier qu'ils perçoivent par tout leur corps, ou bien une voix intime qui se fait entendre dans leur for intérieur. Cette faculté présente quelques dangers, et, quand elle se révèle, mieux vaut s'abstenir de la développer : son abus peut conduire à l'hallucination.

— Les médiums parlants (qu'il ne faut pas confondre avec les médiums auditifs, qui transmettent les paroles entendues) n'entendent pas la voix des Entités ; celles-ci agissent sur les organes vocaux comme ils agissent sur les mains du médium écrivain ; quant au sujet lui-même, il est très généralement inconscient de ce qu'il dit ; il est passif; mais il peut être aussi intuitif.

— Les médiums voyants sont doués de la faculté de voir les choses et les êtres de l'au-delà ; chez quelques-uns, cette faculté s'exerce dans leur état normal ; chez d'autres, elle ne se révèle qu'en cours de transe ou dans un état hypnoïde particulier. Les uns, le plus grand nombre, ne voient qu'une entité qu'ils peuvent décrire; quelques-uns, très rares, voient l'ensemble du monde psychique. De plus, beaucoup d'entre eux ne peuvent exercer leur faculté qu'à l'aide d'un objet destiné à fasciner leur regard : verre d'eau, boule de cristal et toute la série des miroirs dits magiques. Comme l'audition médiumnique, cette faculté peut faire verser dans l'hallucination; il ne faut donc la mettre en œuvre qu'avec une ­certaine prudence.

— Les médiums somnambules ne doivent pas être confondus avec les sujets hypnotiques qui, dans les états superficiels voient, entendent et perçoivent en dehors de la limite des sens; en approfondissant leur état, on peut alors substituer son esprit au leur ; quand cette opération au lieu d'être faite par un vivant, est accomplie par une Entité du mystère, le somnambule devient alors un médium sous le contrôle d'Etres extérieurs.

— Les médiums guérisseurs font de la médecine intuitive ; leur faculté a beaucoup de rapports avec le magnétisme curatif; la seule différence est qu'ils l'exercent inconsciemment.

— Le médium pneumatographe est assez rare : il possède la faculté d'obtenir directement l'écriture des Entités du mystère.

Les médiums écrivains se divisent en plusieurs variétés.

A — Le médium mécanique prête seulement, inconsciemment et passivement, sa main qui est dirigée par une influence extérieure.

B — Le médium intuitif perçoit comme une dictée mentale qu'il transcrit.

C — Le médium semi-mécanique tient des deux précédents : chez lui, la pensée accompagne l'écriture.

— Les médiums excitateurs ont le pouvoir de développer telle ou telle faculté médiumnique chez les personnes désireuses de l'acquérir.

— Enfin, les médiums dessinateurs, peintres, sculpteurs, musiciens, etc., agissent sous une influence extérieure, les uns consciemment, et les autres inconsciemment.

On voit, par ce qui précède, que les facultés médiumniques sont très nombreuses, et il n'est personne, peut-on dire, qui n'ait en quelque sorte la sienne; l'essentiel est que la force substance éthérique extériorée soit en assez grande quantité pour pouvoir être employée par une Entité extérieure dans le sens de la mise en œuvre de cette même faculté. En tous cas, ceux qui l'exercent sont assez connus dans les milieux spéciaux pour qu'on puisse, suivant l'occurrence, recourir à tel ou tel genre de médium.

Mais si l'on veut développer soi-même quelque faculté latente dont on ne fait que soupçonner l'existence, ou même que l'on ignare totalement, comment s'y prendre ?

Ici, c'est plus délicat ; mais, plusieurs fois, des personnes dans ce cas sont venues me demander mon avis: je supposerai donc que je suis devant une d'elles qui désire simplement un moyen d'entrer en relation avec le Mystère ; par suite, je laisserai de côté ce qu'on peut appeler les parties secondaires de la médiumnité, c'est-à-dire le mode curatif, le mode musical, etc., pour m'en tenir simplement aux procédés ordinaires d'intercommunication.

Tout d'abord, les conseils généraux :

— Choisissez une heure, aux environs du crépuscule, où vous soyez habituellement libre, et faites toujours vos tentatives à cette heure-là.

— Ne menez jamais de front et simultanément les essais de deux modes différents de médiumnité.

— Consacrez à chaque tentative dans tel ou tel sens une demi-heure par jour, jamais moins, quitte à augmenter ce temps en cas de nécessité, et cela pendant au moins un mois sans vous laisser jamais rebuter par l'insuccès.

— Ne commencez jamais une séance au hasard, mais, au contraire, débutez toujours par l'invocation des disparus qui vous ont aimé sur terre et avec qui vous voudriez entrer en Communication, cela, bien entendu, si leur vie a été faite de bonté et de probité.

— Durant toute la séance, tenez votre esprit tourné vers eux, afin qu'ils puissent vous aider — ou tout au moins vous protéger.

— A partir du moment où vous avez obtenu un résultat, n'agissez jamais seul, mais ayez près de vous une personne pouvant suivre le phénomène : la solitude pourrait amener pour vous l'emprise d'un être du mal.

— Enfin, ne traitez jamais ces expériences à la légère et ne les regardez pas comme un amusement : vous ne devez voir, dans la faculté à acquérir, qu'un adjuvant qui vous aidera à progresser dans la voie du bien.

Ceci bien compris, laissez de côté les médiumnités auditive et visuelle ; je répète qu'elles sont dangereuses et peuvent mener à l'hallucination ; aussi ne donnerai-je aucune indication pour les acquérir.

Pour vos débuts, essayez plutôt du guéridon qui est la façon la plus simple, sinon la plus rapide, pour communiquer avec le Mystère[16].

Dans ce but, prenez un guéridon rond, léger, à trois pieds, que vous aurez laissé toute la journée dans une pièce de température plutôt chaude. Placez-vous à plusieurs autour de lui, en entremêlant les sexes, de façon que toutes les mains se touchent mais très légèrement et sans jamais appuyer fortement sur le plateau de la table. Faites vos invocations et attendez patiemment.

Si rien ne se produit, recommencez le lendemain, dans les mêmes conditions et avec les mêmes personnes.

S'il se produit des mouvements du guéridon, suivez-les sans jamais les contrarier sans jamais les aider non plus.

Si les mouvements deviennent assez importants, posez des questions en convenant préalablement qu'un coup signifie oui ou A, deux coups, non ou B, trois coups C, quatre coups D, etc.

La première question à poser est de demander qui, de tous les assistants, est celui de qui émane la force; c'est le médium; dès lors, c'est la personne désignée qui aura la direction de la séance et posera les questions.

Parmi ces questions, aucune, sous quelque prétexte que ce soit, ne doit avoir de rapport avec les intérêts matériels ; on obtient presque toujours des réponses, oui ; mais si l'Entité qui est venue à vous est élevée, votre question la met en fuite et elle est remplacée par un être bas ou léger qui se fait un malin plaisir de vous induire en erreur. Songez en effet à la grise mine que vous ferait un ami que vous rappelleriez d'Amérique où il est occupé, uniquement pour savoir son opinion sur le gagnant du prochain grand prix, ou le cours probable de telle valeur !

Au contraire, vos tentatives répétées en ce sens n'ont-elles abouti à aucune réussite, et êtes-vous assuré, après de persévérants efforts, qu'elles n'ont pas chance d'en obtenir davantage ?

Essayez d'un autre procédé ; après un repos d'une huitaine, installez-vous devant un oui-jà. Le oui jà est constitué par une table, planchette ou carton d'environ 0,60 sur 0,40, comportant tout l'alphabet, la série des chiffres, les mots oui, non et différents signes. Sur cet objet, on place une sorte de petit chariot monté sur roulettes ou sur billes, c'est-à-dire pouvant évoluer facilement dans tous les sens. On appuie une main sur le chariot — d'ordinaire la main droite — de façon à l'y tenir en équilibre, sans qu'elle y pèse, sans que, davantage, le bras repose lourdement sur le plateau : en un mot, rien ne doit gêner les évolutions, les caprices même du petit chariot.

Vous attendez dans le calme et le recueillement, sans faire de mouvement, même pour inciter à la mise en train: vous ne donneriez lieu, en ce cas, qu'à une détente nerveuse et vous finiriez par ne plus savoir, lequel, du chariot ou de votre main, entraîne l'autre.

Les mouvements, quand il s'en produit, sont d'abord lents et comme hésitants ; peu à peu, ils prennent de la vivacité et de l'ampleur ; enfin, l'instrument circule près des lettres comme s'il cherchait à dire quelque chose. Dès que les mouvements sont assurés, vous pouvez poser une question.

En fait de questions, cherchez d'abord, au oui-jà comme au guéridon dont il été parlé plus haut, comme à l'écriture automatique dont il va être question plus loin, à savoir à qui vous avez affaire, c'est-à-dire si votre correspondant est sérieux ou moqueur, bon ou mauvais: cela ressortira de ce qu'il vous dira; dès que vous aurez une certitude, renvoyez impitoyablement tout être mauvais, fût-ce même en délaissant la séance. D'autre part n'essayez jamais de ruser de finesse avec lui : c'est un jeu qui tournerait contre vous ! Rappelez-vous, en effet, que votre interlocuteur dans le Mystère, pourvu qu'il ait quelque puissance, lit vos pensées à mesure qu'elles se forment dans votre cerveau et qu'il lui est autrement facile de se cacher de vous qu'à vous de vous cacher de lui.

Si le oui-jà ne vous donne pas encore de résultats de cette façon, essayez d'une manière que j'ai vue souvent produire de surprenants effets. Maintes fois, en effet, j'ai constaté ceci : deux personnes n'obtenant jamais aucun mouvement quand elles placent isolément la main sur le chariot, le mettent en marche dès que, ensemble, elles y appliquent l'une sa main droite et l'autre la main gauche, les deux mains étant superposées : il y a là une assez obscure question de mélange de fluides. Mais, quelle qu'en soit la raison, le résultat est, très souvent, des plus satisfaisants.

Si donc vous voyez que, seul, vous n'aboutissez à rien, essayez avec plusieurs personnes à tour de rôle ; il n'est pas nécessaire de persévérer un mois avec chacune d'elles : une seule séance suffira pour vous révéler vos facultés respectives.

Enfin, les résultats du oui-jà sont-ils définitivement nuls ? En dernier ressort, essayez de l'écriture automatique bien que, à vrai dire, l'écriture automatique soit plutôt un perfectionnement des deux autres systèmes, c'est-à-dire qu'elle se manifeste surtout chez la personne qui, au guéridon ou au oui jà, a déjà donné des preuves de médiumnité ; mais enfin, quelquefois, il est arrivé que ce mode de médiumnité se développât alors que les essais en d'autres sens n'avaient jusqu’'alors rien produit.

Si vous essayez de ce système, placez-vous de votre façon habituelle pour écrire, tenant à la main un crayon à mine plutôt dure pour ne pas se briser trop facilement — dont la pointe reposera sur une feuille de papier ; le poignet ne doit porter que très légèrement sur la table, le poids de la main aussi allégé que possible reposant presque entièrement sur le petit doigt ; le coude doit être dans le vide ; rien en un mot, ne doit gêner la marche du crayon.

Si vous devez acquérir cette sorte de médiumnité, vous sentirez votre main comme entrancée ; ne contrariez pas son mouvement ; ne l'activez pas davantage ; tout votre organisme doit être inerte et passif. Le crayon tracera des lignes d'abord informes, puis plus régulières, qui ensuite deviendront des jambages, et enfin des lettres, pendant que vous sentirez un léger engourdissement vous gagner l'avant-bras.

Arrivé à ce point, il faut faire bien attention à ce que vous écrivez et analyser scrupuleusement la façon dont vous agissez, car il se présentera possiblement un écueil que vous ne
soupçonnez pas. Il se peut, en effet, qu'après plusieurs séances de traits ou de bâtons, votre neuricité exaspérée se fasse jour malgré vous et qu'elle cause dans votre main des mouvements spasmodiques qui, pour vous, seront inconscients et qui, cependant, n'auront leur source qu'en vous. Faites y bien attention, rappelez tout le calme et toute la patience dont vous êtes capable, et si alors vous voyez les traits cesser, c'est que l'écriture provenait de vous seul: en ce cas, recommencez sur nouveaux frais.

Si, malgré toute votre bonne volonté, malgré tout votre désir, vos tentatives par ce troisième procédé ont été aussi nulles que par les deux autres, prenez-en votre parti et renoncez : vous êtes de ceux qui n'extériorent pas leur force substance éthérique avec assez d'abondance pour obtenir des phénomènes médiumniques.

N'essayez pas alors d'autres voies, d'abord parce que, exigeant une plus grande dépense de forces, elles vous seraient aussi inutiles que les premières et ne feraient que vous prendre un temps qui peut être employé plus utilement, et que, parmi elles, les unes ne s'ouvrent que fortuitement, sous 'empire de certaines circonstances spéciales, et les autres présentent du danger pour le simple amateur que vous êtes.

Je viens de dire : « Prenez-en, votre parti... » Soit, mais ne désespérez pas. Si en effet nous savons ce qui constitue la médiumnité, nous ignorons les causes qui amènent en elle de ces modifications que nous ne pouvons que constater sans comprendre leur mode de production.

Par exemple tel médium très puissant verra un jour sa force diminuer puis disparaître sans savoir ,à quoi attribuer cet effet[17] ; telle personne, au contraire, qui a vainement essayé, durant des années, d'acquérir une petite médiumnité et y a renoncé devant l'inutilité de ses efforts, pourra se voir, au contraire, subitement entrancée, et générera de beaux phénomènes sans se rendre compte du pourquoi de cette modification radicale de son organisme; parmi les causes déterminant de tels changements, cependant on peut placer une grande douleur morale, une modification de l'état de santé et quelques autres contingences qui influent profondément sur le cours d'une vie.


Chapitre IV - LA VOIE ECTOPLASMIQUE

L'ectoplasme existe-t-il dans la réalité des choses ? Pour moi, j'avoue bien franchement n'en avoir jamais vu, et, par suite, expérimentateur avant tout, je reste sur mon doute, comme j'ai gardé un doute sur l'objectivité des fantômes, vivants ou morts tant que je n'en ai pas vu, tant que je n'en ai pas manipulé, tant que je n'en ai pas produit.

Mais je me hâte d'ajouter que ce doute est purement doctrinal et en quelque sorte théorique, car si, d'une part, j'admets le principe d'Hamlet « Tout est possible ! » d'autre part, je me réserve de contrôler moi-même, judicieusement, scientifiquement toutes les espèces qui peuvent se présenter, car il faut bien reconnaître que les phénomènes métapsychiques sont des plus troublants et que, par suite, la prudence, quant à leur admission, n'est jamais exagérée.

Certes, des hommes de science de haute science ont eu l'occasion de contrôler l'ectoplasme ; certes, la théorie pure n'y est aucunement contraire, car enfin, la substance du fantôme, au lieu, de se former extérieurement au médium, par la condensation des vapeurs fluidiques qu'il émane, peut tout aussi bien se former dans l'intimité de son organisme et n'en être émanée qu'après sa constitution complète ; mais, encore une fois, le fait est là : jamais je n'ai vu d'ectoplasme surgir du médium. Au contraire, toutes les fois que j'ai eu à constater la formation d'entités fantomales et j'ai vu maintes et maintes fois le phénomène se produire avec Eusapia Paladino, Miller et bien d'autres toujours, invariablement, le phénomène suivait cette marche : un petit filet de vapeur claire, bleutée, légèrement brillant sortait du buste du médium ; ce filet de vapeur croissait progressivement en volume et en luminosité, formant auprès du sujet comme un nuage blanchâtre légèrement bleu, assez lumineux pour être vu distinctement dans l'ambiance, et strié, par moments d'éclats rapides, plus lumineux que le reste et qui semblaient le parcourir ; l'émanation fluidique du médium continuant, ce nuage très léger prenait lentement une stature humaine dont le sommet brillait plus que le reste, et dont la base se fondait dans l'obscurité peu à peu, lentement, on voyait deux points lumineux s'affirmer, vers le haut de la forme, qui devenaient des yeux brillants autour desquels se modelait le reste du visage; puis le buste avec les bras se dégageait à son tour, moins lumineux que la tête, et enfin le bas de l'apparition se faisait voir, perdue dans une sorte de draperie fluidique plus sombre que le reste : le fantôme parlait quelquefois avant sa condensation complète, mais plus généralement après, et il se motivait alors horizontalement, glissant sur le parquet plutôt qu'il ne marchait... Telle est la norme ordinaire de formation pour les fantômes des défunts qu'il m'a été donné de voir se matérialiser sous mes yeux.

Ma conviction est donc absolue quant à l'objectivité du fantôme lui-même, et ma réserve ne porte que sur la réalité de condensation de l'ectoplasme dans l’organisme même du médium générant le phénomène.

Cette matérialisation du fantôme ressortit complètement à la médiumnité dont il a été question ci-dessus, mais avec cette différence que les menus phénomènes décrits dans le chapitre III ne nécessitent, pour être réalisés, que l'extérioration, par le médium, d'une quantité relativement restreinte de force éthérique, tandis qu'une matérialisation proprement dite exige, pour se produire, l'émanation de véritables torrents de force qui, ensuite, laissent le sujet positivement épuisé, parfois même plusieurs jours après l'expérience ; je n'ai jamais vu qu'un seul sujet Miller faire preuve, au sortir d'une séance, d'une vitalité sensiblement égale à celle qu'il possédait avant. Aussi les sujets que l'on qualifie de « médiums à matérialisation» sont-ils assez rares, d'autant plus que nombre d'entre eux n'opèrent que dans une intimité restreinte et se refusent, vu les risques de l'expérience, à se produire devant un public où, à côté de personnes au courant de cette phénoménalité spéciale, se glissent trop souvent des ignorants et, parfois même, des assistants hostiles qui n'hésitent pas à mettre en jeu la santé et même la vie du médium en cause.

Il faut bien savoir, en effet, que la substance force éthérique ou odique qui constitue le fantôme n'est rien autre que la force vitale et neurique du sujet, et que cette force vitale et neurique, extériorée par lui, est des plus instables; qu'elle se dissout dans un rayon de lumière blanche et qu'enfin il y a répercussion, sur l'organisme du médium de tous les sévices, de toutes les plaies, de toutes les lésions, en un mot, de toutes les atteintes, quelles qu'elles soient, qui ont pu endommager la matérialisation[18].

Lorsqu'on assiste à ce genre de séance, il faut, comme d'ailleurs pour n'importe quel phénomène psychique, se conformer rigoureusement aux demandes du sujet qui, la plupart du temps, n'est que le porte-parole des Entités agissantes, lesquelles peuvent demander plus ou moins de lumière anactinique rouge ou jaune[19] pour éclairer ou assombrir la pièce, ou des écrans au sulfure de calcium phosphorescent pour rendre certaines formations plus distinctes, ou bien encore des chants pour unifier la mentalité des assistants dont la diversité peut être un obstacle à la production des phénomènes, etc.

Mais lorsque enfin, après une attente plus ou moins longue, la matérialisation s'est révélée, quel, ravissement, quel enthousiasme intime, quelle émotion pour le spectateur reconnaissant, devant soi, un être tendrement aimé sur terre et disparu depuis de longues années, qui parle avec le son de voix accoutumé, avec les gestes d'autrefois, avec les caresses de la main qui semblent d'hier ! Pour ma part, je n'ai jamais rien ressenti d'aussi profondément émotionnant que la première fois que je me suis trouvé en présence d'une telle révélation ! Il me souvient encore, après des années et des années, de la pensée intime qui s'imposait à moi : « Combien la mort, dont nous nous faisons une image d'épouvante et de terreur, est supérieure à la vie que nous vivons sur terre ! »

Très généralement les matérialisations, quand on a affaire à un puissant sujet médiumnique, sont à la fois visibles, audibles et tangibles; on peut les presser dans ses bras, les voir comme si l'Entité était matériellement vivante, converser avec elles... La seule différence entre elles et un être terrestre ordinaire, c'est cette lumière intérieure qui les illumine d'une lueur plus ou moins vive, avec un ton azuré infiniment doux au regard, et que n'ont jamais pu rendre les pâles imitations créées par les prestidigitateurs... Pour les heureux à qui il a été donné de contempler une matérialisation complète, même s'ils n'ont pas vu en elle un parent ou un ami décédé, il y a, pour jamais dans leur cœur, un souvenir d'une délicatesse exquise et d'une merveilleuse beauté, presque divin à force d'être superbe: ils ont vu vivre la mort dans toute son idéale splendeur.

Il a été dit plus haut que ce procédé d'intercommunication ressortissait en somme à la voie médiumnique : en effet, en soi, il n'en est que le développement. Mais il existe, entre ces deux voies une différence capitale qui m'a amené à consacrer à celle-ci un titre spécial : c'est que, dans la voie médiumnique, si l'on recourt à un intermédiaire, on n'est jamais assuré que les pensées énoncées n'émanent pas de son propre fonds, et, si l'on agit par soi-même, on peut craindre d'être le jouet de sa propre neuricité exaspérée par un motif ou par un autre ; au contraire, quand on se trouve en face d'une matérialisation, le médium est, du fait, éliminé; et, quand cette matérialisation vous adresse la parole, il y a toute chance pour que cette parole soit, en notre monde, une révélation dans tous les sens du mot d'un monde supérieur.

Il est aussi un autre genre de matérialisation dont il convient de dire ici quelques mots, mais dont je conseillerai plutôt de s'écarter, car, à moins qu'on ne vive journellement avec le médium et que, par suite, on n'ait avec lui de fréquentes séances où, pour lui, l'accoutumance se fera progressivement, on n'y peut guère trouver que la sinon même un soupçon de fraude : je veux parler de la transfiguration, appelée aussi incarnation.

Ce phénomène particulier consiste en ceci que le sujet médiumnique se trouve en quelque sorte envahi complètement par l'Entité appelée, qui lui modifie le masque de façon à lui donner la représentation de sa propre figure lorsqu’elle même était vivante. Mais si le médium est, par exemple, une jeune fille de quinze ans et si l'Entité qui l'intrance est un homme mort à quatre-vingt ans, on voit tout de suite la difficulté qui s'oppose à une aussi radicale transformation des traits, transformation qui ne peut s'obtenir qu'à la suite d'essais longuement répétés et qui, au premier abord, ne paraît donner lieu qu'à la laide grimace d'un visage torturé, ne rappelant en rien ni celui du médium ni celui de l'entité attendue.


Chapitre V - LA VOIE MAGNÉTIQUE

Ici, nous nous trouvons en présence de deux façons de procéder, qui différent essentiellement l'une de l'autre, suivant que l'on se propose de pénétrer dans le mystère de la mort pour étudier ce qui s'y passe, ou bien d'appeler à soi un défunt nommément désigné en vue de s'entretenir avec lui. J'examinerai donc successivement ces deux procédés magnétiques.

A — Exploration de la mort

En l'ouvrage déjà cité[20] j'ai déjà eu, à dire quelques mots sur la façon de procéder quand on veut rejeter un sujet magnétique[21] dans le mystère. Mais cette opération est assez délicate on peut même la qualifier de dangereuse pour expliquer en détail son mode de production.

En effet, quelque lecteur, après avoir pris connaissance de l'ouvrage en question, pourra être tenté de réaliser l'expérience : je désire qu'il ne le fasse qu'en toute connaissance de cause, c'est-à-dire avec le moins de risques possible pour le sujet.

Ce serait en effet se tromper étrangement que de regarder cette expérience comme un simple jeu : elle est, au contraire très longue pour qui veut agir prudemment très méticuleuse, très délicate, et, pour le sujet en hypnose, elle constitue une série d'épreuves, où les craintes, les angoisses et les épouvantes ne font généralement que se succéder, pour ainsi dire à jet continu.

D'abord le choix du sujet.

On ne peut, naturellement, utiliser le premier sujet venu, et celui qu'on prendra doit présenter certaines qualités indispensables.

Il doit être d'abord doué d'une excellente santé ; se figure-t-on, en effet, un cardiaque soumis à toutes les terreurs qui marquent chaque pas en avant de l'autre côté du voile ? Se figure-t-on, plus simplement, un valétudinaire ayant à supporter une somme d'émotions que nul ne peut préjuger d'avance, et qui, parfois dépassent de beaucoup les prévisions les plus extrêmes ?

Le sujet doit être en possession d'une grande puissance psychique, bien développée ce n'est pas, en effet, un débutant à peine dégrossi, ou même un sujet quelconque que l'on peut soumettre à cette opération ; il faut qu'il ait longtemps travaillé autant que possible avec la personne qui veut lui faire subir cette épreuve, et qu'il ait passé par toutes les phases qui constituent le bon sujet, qu'en un mot on soit sûr de lui.

Il doit avoir une confiance absolue, sans limites, en l'opérateur, confiance qu'il ne peut acquérir qu'à la longue, par la constatation qu'il a faite lui-même de la somme de prudence qu'apporte le magnétiseur au cours de son expérimentation. Cette question a été résumée plusieurs fois par un mot prononcé par mon principal sujet de recherches, Mme Lambert, à propos de certaines expériences que je trouvais moi-même assez risquées et où j'étais surpris par l'abandon du sujet. Quand alors je lui demandais, en son hypnose :

— Vous n'avez pas peur ?

— Avec vous, non ! Mais avec tout autre, je résisterais de toutes mes forces.

— Même, lui demandai-je un jour insidieusement, sachant le culte qu'elle professe pour la mémoire du Colonel de Rochas, même si cet autre était M. de Rochas ?

Ce jour-là, il répondit nettement, fermement : Oui.... Je résisterais... Même à M. de Rochas... il y a des fois où je ne le trouvais pas assez prudent.

Cela montre que le sujet, même en hypnose, possède un raisonnement intime à l'égard de son magnétiseur : c'est ce raisonnement qui finit par créer en lui la confiance indispensable à qui veut le mener au-delà des limites habituelles de l'expérimentation.

Une qualité primordiale du sujet doit être un grand courage ; c'est le corollaire de la confiance, mais cela ne se commande pas. Si, en effet, on agit sur un sujet timoré, il se peut que l'on perde son temps, en l'amenant à une certaine limite qu'ensuite, avec la dernière énergie, avec une indomptable résistance, il se refuse à franchir.

Par contre, je suppose l'opérateur doué de tout le sang-froid nécessaire pour parer à tous les incidents inattendus, et même, et surtout aux accidents qui peuvent se produire; c'est un élément essentiel de réussite car le sujet, même le plus dévoué, ne s'abandonnera jamais que dans la mesure où il se sentira protégé.

Enfin, le magnétiseur devra toujours — je dis toujours — user de la plus grande loyauté envers le sujet en l'avertissant à l'état de veille, du danger que peut présenter l'expérience préparée, de façon qu'il y acquiesce dans sa conscience normale: il faut donc, pour qu'il donne son consentement, qu'il éprouve, là encore, vis-à-vis de son magnétiseur, une confiance basée à la fois sur l'estime et sur un long passé de travaux suivis en commun et sans trop d'accidents dont il ait eu à souffrir.

Ce point de départ une fois acquis, on endort le sujet doucement par des passes[22] ; quand son sommeil est suffisamment profond, on commence par le dédoubler[23] : c'est une simple mesure de prudence, en ce sens que, en cas d'accident, toujours à redouter au cours de si délicates expériences, on peut agir à la fois matériellement sur l'organisme et magnétiquement sur le double, pour remettre les choses en état.

Quand le double le fantôme est bien condensé (généralement à la gauche du sujet) sur le siège préalablement préparé pour le recevoir, on agit alors sur le sujet, par suggestion verbale, très autoritaire, en le replaçant à dix ans, vingt ans, en arrière.

— Vous avez trente ans... vingt ans... quinze ans... dix ans... huit ans... six ans... quatre ans... trois ans.... deux ans...un an...

Il est bon, surtout au cours des premières tentatives, de tenir au sujet une conversation de quelques instants, appropriée à l'âge où on le replace, pour l'habituer, si je puis m'exprimer ainsi, à reprendre pied dans chacune des époques successives où on le situe.

Les premières fois, il éprouve, quand on le change d'âge, un léger sursaut qui disparaît avec l'accoutumance. Un phénomène bizarre se produit la plupart du temps, c'est que la voix du sujet, lorsqu'on lui parle, change de timbre en se rajeunissant, pour devenir vers deux ans une véritable voix de bébé.

Un autre phénomène non moins étrange, est celui-ci : Le sujet se recroqueville, se tasse sur lui-même de plus en plus en s'inclinant du côté où est son double : la raison du fait est que le fantôme, obéissant à l'ordre du magnétiseur plus facilement que l'organisme physique, reprend la taille qu'il avait à l'âge où on vient de le replacer et, comme il constitue, pour ainsi dire, le moule du corps matériel, ce dernier se replie sur soi-même pour se maintenir en quelque sorte en harmonie avec son propre moule.

J'ai, de plus, l'habitude de prudence, que je recommande à tout expérimentateur, de prendre entre mes doigts le pouls du sujet quand, en rétrogradant, il atteint l'âge où l'enfant ne parle pas encore; cela permet de se rendre compte, au moins d'une façon relative, de ce qui se passe en lui.

Quand on a atteint un an, on continue :

Vous avez dix mots... huit mois... six mois... quatre mois... deux mois... un mois... Il y a vingt jours que vous êtes au monde... quinze jours... dix jours... huit jours... six jours... quatre jours... trois jours... deux jours... un jour... Il y a vingt heures que vous êtes né... seize heures... douze heures... neuf heures... six heures... quatre heures... trois heures... deux heures... une heure... Depuis cinquante minutes vous êtes sur terre... depuis quarante minutes... trente minutes... vingt minutes... quinze minutes... dix minutes... huit minutes... six minutes... quatre minutes... trois minutes... deux minutes... une minute... Il y a cinquante secondes seulement que vous êtes au monde... quarante secondes... trente secondes... vingt secondes... dix secondes... huit secondes... six secondes... quatre secondes... trois secondes... deux secondes... une seconde...

Quand, après cette ultime seconde, l'expérimentateur prononce l'ordre : « Maintenant, retournez dans le sein de votre mère ! » il est ordinaire que le sujet se rebelle, refuse d'obéir, se roule sur le sol en vagissant; il y a une lutte parfois angoissante entre la volonté de l'opérateur et l'instinct du sujet, lutte dans laquelle le magnétiseur a rarement le dessus au cours des premiers essais, car, si bien que soit disposé le sujet, il a peur, et cette peur détermine parfois chez lui une résistance qui ne se peut vaincre qu'à la longue, à la suite de tentatives où la fermeté et la douceur doivent s'allier dans une juste mesure.

Pour franchir cet obstacle, il est parfois besoin de multiples séances où l'on ne peut, au point critique, ni raisonner le sujet qui est dans une période vitale où la raison n’existe pas encore, ni parler avec lui pour le rassurer, puisqu'il ignore à la fois le sens des mots et l'usage de la parole: c'est chez lui, je le répète affaire d'instinct et de sauvegarde personnelle.

Afin d'abréger ce temps d'attente en rassurant le sujet et en agissant comme si je m'inclinais devant sa résistance, j'ai recours à un moyen qui peut sembler bizarre mais qui réussit assez bien. Voici: Avant de commencer la régression de la mémoire, je dis au sujet en hypnose : « Quand il s'agira de rentrer dans la vie utérine, vous me résisterez... Pourquoi ?... Est-ce qu'il y a du danger ? Non... Je ne vous ai jamais fait de mal... Pourquoi vous en ferais-je ?... Allons... laissez-vous faire !... Je ne veux pas agir malgré vous... Eh bien ! C’est vous qui me ferez savoir que vous êtes décidé à obéir... A une seconde de votre naissance, vous ne parlez pas, c'est entendu ; mais vous savez téter, dès cet âge-là... Donc, je vous mettrai mon doigt dans la bouche, et, si vous consentez, vous téterez ! »

Il y a là un instinct assez obscur qui force en quelque sorte le nouveau-né à téter tout ce qu'on lui place dans la bouche... Le sujet se croit-il engagé par ce commencement d'exécution, ou bien emporte-t-il au fond de cette régression le vague souvenir des encouragements qui lui ont été donnés ? Je ne sais, mais le fait est là: ce procédé m'a généralement réussi. Je dis généralement, car il y a des sujets qui ne cèdent à aucun moyen : chez eux l'instinct de la vie normale et de sa conservation est plus fort que tout.

Quoi qu'il en soit, quand on a réussi à replacer le sujet dans la vie utérine[24], on lui en fait remonter le cours comme précédemment : huit mois, sept mois... vingt-cinq jours, vingt jours... vingt heures, quinze heures.., cinquante minutes, quarante minutes.., cinquante secondes, quarante secondes... quatre, trois, deux secondes... une seconde après la conception.

A la suggestion impérative qui suit : « Repassez maintenant avant votre conception ! » répond d'ordinaire, les premières fois, un refus du sujet refus muet, cela va sans dire, puisque, à ce stade de sa vie„ il ignore la parole ; il reste inerte, sans obéir; et si on insiste, il présente une défense infiniment plus âpre que celle à laquelle il a eu recours avant de passer de la vie normale à la vie utérine.

Et cela se comprend, car, pour lui, ce qu'on lui demande, c'est en somme, puisqu'il ignore les antériorités de la vie, de rentrer dans le néant. Souvent, cette résistance qu'il oppose instinctivement est des plus impressionnantes, et, surtout aux premiers essais, il convient d'y avoir égard et de le ramener à son âge normal[25] ; ce n'est que par la volonté, une volonté de plus en plus impérieuse à chaque nouvelle tentative que l'on arrive à amener le sujet aux fins voulues, ce qui produit dans tout son organisme une sorte de sursaut nerveux.

La première fois qu'il se décide à retourner dans les antériorités de la vie, une seule question, mais une question primordiale, est à lui poser : « En cet état, pouvez-vous parler ?» S'il ne répond pas, on le fait rentrer dans le sein de sa mère et on le ramène à son âge normal, quitte à renouveler la tentative quelques jours plus tard.

Si, chaque fois, le résultat est aussi négatif, on n'a qu'à passer par profits et pertes tout le temps souvent des mois et des mois consacré à aboutir à cette vaine issue : le sujet est inutilisable pour les recherches dans le Mystère, et il faut recommencer sur nouveaux frais avec un autre que l'on espérera plus apte à atteindre le but poursuivi.

Si, au contraire il répond affirmativement et assez souvent par un simple signe de tête, cela suffit pour la première épreuve. Il faut aussitôt, c'est-à-dire avant qu'il ait eu le temps de se rendre compte de l'état où il est, le replacer dans la vie utérine, puis le ramener au temps présent. Il faut, en un mot, lui donner l'accoutumance au Mystère par des essais réitérés mais de peu de durée, faute de quoi la terreur qu'il éprouvera invariablement au premier contact un peu prolongé avec le Mystère peut créer en lui un instinct de révolte qu'il serait ensuite très difficile de dominer. En un mot, on ne doit l'exposer à l'inévitable épouvante que quand il a bien pris l'habitude de franchir la limite de la vie physique.

Dans toutes ces expériences, en effet, les paroles du sujet aboutissent presque invariablement au même leitmotiv : « J'ai peur ! J'ai peur ! » Il serait imprudent de négliger cette angoisse et il convient de le ramener à son âge normal dès qu'il la manifeste, parce que c'est en se sentant protégé qu'il contractera l'assurance nécessaire, de sa part, à la poursuite de ces recherches.

Dans les conditions où il se trouve situé, le sujet s'exprime avec une légère difficulté ; sa voix est sourde, lointaine et, parfois, difficilement perceptible même si l'on y apporte la plus grande attention; cette difficulté de parole peut atteindre l'aphonie ; en tout état de cause, on peut essayer de lui dégager les cordes vocales par des passes transversales opérée, sur le cou, mais sans être sûr d'améliorer sa diction ; dans ce cas, il n'y a qu'un parti à prendre mettre fin à l'expérience en amenant le sujet à son âge normal.

D'ordinaire, à la question : « Où êtes-vous ? » il répond : « Dans le gris » ou « Dans le noir ». Puis il distingue autour de lui « comme un mur infranchissable de ténèbres » ou bien ce sont des êtres ou des fluides rouges qui le terrifient et toujours cela finit par : « J'ai peur ! J'ai peur ! »

Il faut l'habituer à considérer en face ce qu'il regarde comme des dangers, et, à la première accalmie qu'il présente, l'engager à diriger sa vue vers le lointain ; il finira par y apercevoir des lueurs blanches qui l'attirent parce qu'il les devine en quelque manière bienfaisantes ; en même temps, il percevra des harmonies merveilleuses quoique encore bien vagues. On le pousse de plus en plus vers ces lueurs et vers ces harmonies qui, à mesure qu'il s'en rapproche, deviennent pour lui d'admirables clartés et des chants divinement sublimes. Mais, pour y arriver, il a des obstacles successifs à surmonter ou bien des hostilités mystérieuses à vaincre ; il faut le soutenir, l'encourager, lui promettre l'ineffable bonheur quand il aura atteint les clartés.

D'abord, il est en quelque sorte dérouté par les fluides sombres ou noirs dont les volutes mouvantes l'enserrent dans leurs replis et où il ne sait comment se diriger : ce sont, en réalité, les principes hyliques où s'enlise l'âme lorsqu’aban­donnant la vie supérieure elle va renaître à la vie terrestre. Parmi ces fluides, quelques-uns lui paraissent rougeâtres et lui causent une instinctive terreur ; il convient de l'habituer à les examiner, et il finit par voir que leur couleur provient des êtres rouges qui y évoluent, et qui sont des désincarnés reliés encore à la terre par leurs passions dont ils n'ont pu s'affranchir, par le mal qu'il y ont commis et dont ils ne sont pas libérés, par toutes les causes enfin qui mettent obstacle à l'évolution posthume ; c'est dire que ces entités sont mauvaises et leur seule vue épouvante le sujet qu'il importe de soutenir et de rasséréner au cours de ce stade.

Progressivement, évoluant vers les clartés lointaines, il se voit entouré d'étoiles ou feux follets plus ou moins pâles et brillant, par lesquels il se sent comme protégé. Si on les lui fait regarder avec attention, il finit par reconnaître que ce ne sont pas des étoiles, mais des lueurs où se recèlent des êtres de bien qui lui donnent confiance. Telle est l'aspect que revêt généralement ce premier stade[26].

Dès que le sujet a repris confiance, il faut rappeler son attention vers les splendeurs lointaines, vers les clartés divines et les chants mystérieux, et l'inciter à remonter vers eux malgré tous les obstacles du chemin. Et quand enfin il les a rejoints, il faut beaucoup d'autorité sur lui ; il convient de n'avoir aucun égard à ses supplications et à ses révoltes pour demeurer en cet état où il se sent à l'apogée du bonheur, sans quoi, je ne sais ce qui arriverait, vu sa répugnance à reprendre contact avec les misères de la vie terrestre.

Ce n'est que quand il a bien contracté l'habitude de revenir sur terre qu'on peut sans inconvénient le laisser demeurer mais jamais bien longtemps dans la béatitude du Mystère. On peut alors l'interroger, et il raconte ce qu'il voit autour de soi et ce que lui disent les Entités avec lesquelles il entre en communication. En telle occurrence, principalement, sa voix est frêle et lointaine : il parle comme dans un rêve. Dans tous les cas, il faut le surveiller de très près et lui poser toujours des questions retenant son attention puisqu'il y doit répondre ; faute de quoi il tombe très facilement dans une extase qui se traduit par une catalepsie dont on a d'autant plus de peine à le retirer qu'on ne peut guère agir que sur son double, puisque, dans cet état, son organisme est, pour lui, comme inexistant.

On demandera peut-être : « Combien de temps faut-il consacrer à telle expérience pour l'amener au résultat voulu ? » — Voici : Il y a des sujets plus ou moins bien disposés, mais je ne conseille pas de les pousser trop vivement, parce que leur manque d'accoutumance pour chaque stade de l'opération peut provoquer des accidents de graves accidents. Avec le sujet Mme Lambert qui est un sujet d'élite j'ai employé un peu plus de deux ans, à une séance par semaine mais avec interruption des séances durant l'été, ce qui forçait, lors des reprises, à consacrer quelques séances à une sorte de révision des points acquis, j'ai, dis-je, employé un peu plus de deux ans pour simplement la rejeter avant la conception.

Si quelque lecteur pressé trouve que c'est bien du temps, je lui répondrai ceci : En de telles expériences, il est un élément qu'il ne faut jamais éliminer: la conscience de l'opérateur ; or, il est facile à un simple lecteur de critiquer la perte de temps ; il est plus malaisé à un opérateur de charger sa conscience d'un accident où peut se trouver engagée une vie humaine. Pour moi, je préfère, je le dis bien hautement, me paraître ridicule à moi-même à force de précautions surajoutées les unes aux autres, à force de tentatives répétées à satiété, jusqu'à ce que j'en sois absolument sûr, à force de temps consacré à ce qui peut sembler des vétilles. Or, sait-on jamais, quand on marche sur ce terrain redoutablement inconnu, si ce qui semble de prime abord une vétille, n'est pas la condition essentielle dont dépend la vie du sujet ? J'aime mieux dis-je, avoir nettement perdu du temps et de la peine, et pouvoir proclamer avec la satisfaction que l'on peut imaginer : au cours de ces recherches dans le Mystère, au milieu d'embûches d'autant plus dangereuses qu'elles sont plus ignorées, je n'ai jamais eu le moindre accident à me reprocher, jamais!

Certes, j'ai eu à parer à nombre incidents : il n'en saurait être autrement et de telles surprises foisonnent au cours de ce genre de recherches où l'on s'aventure dans des régions absolument ignorées à tout point de vue ! Le plus grave qui me soit arrivé dans cet ordre d'expériences et je ne le mentionne ici que pour montrer aux expérimentateurs combien il importe de toujours procéder rigoureusement de la même façon chacun des essais m'est survenu un jour où, par une inconcevable distraction, j'ai omis le parcours de la vie utérine et fait passer le sujet sans transition de la vie normale (une seconde après la naissance) à la vie antérieure à la conception. La suggestion était à peine donnée que je m'aperçus de ma faute et tentai de la réparer ; mais il n'était plus temps. Le sujet fut soudain en proie à une contracture générale qui le recroquevilla sur lui-même, et tomba dans une profonde catalepsie. Heureusement et probablement par suite de son habitude de passer par la vie utérine, il n'avait pas abandonné son organisme, sur lequel je pus agir, et quelques minutes qui, à la vérité me parurent longues comme des siècles me suffirent pour le tirer d'affaire.

Quant aux accidents proprement dits de ceux qui, par exemple, laissent le sujet dans le coma pendant des jours et des semaines (ce qui est arrivé au Colonel de Rochas au cours d'une expérience où il avait eu l'imprudence de confier le contrôle à un médecin de qui l'incrédulité faillit susciter un malheur) jamais, je le répète, il ne m'en est arrivé ; cela tient, selon moi, au luxe de précautions, minutieuses parfois jusqu’a la puérilité, auxquelles j'ai pour principe de ne jamais me soustraire. J'estime, en effet, que dans ces conditions un opérateur a charge d'une vie humaine, et qu'une telle responsabilité ordonne de prévoir tout danger possible, et d'y parer avant de pousser plus loin l'expérience.

C'est à l'aide du procédé qui vient d'être exposé, et en utilisant un certain nombre de sujets, qu'il m'a été donné de pénétrer de l'autre côté du voile, et de jeter un regard curieux sur les conditions de la vie 'dans l'Au-delà, et c'est le résumé de mes études expérimentales en ce sens que j'ai pu donner au public sous le titre de La vie posthume d'après la psychologie expérimentale, la psychophysiologie et la physique.

Et, faut-il le dire ? J'ai, pour ma part, infiniment plus de confiance dans ce procédé que dans la voie médiumnique, car, endormant moi-même le sujet, je sais où je le conduis, je puis lui donner toutes les suggestions nécessaires (ne me rapporter que ce dont il est sûr, ne pas puiser ses réponses dans mon cerveau, etc.) je puis en un mot lui faire plus de confiance qu'à un médium qui, endormi par une Entité astrale que je ne connais pas[27], peut me raconter tout ce qu'il veut ou tout ce qu'on lui ordonne de me dire, sans que j'aie aucun critérium de sa véracité.

Cela veut-il dire qu'on peut accepter aveuglément toutes les paroles d'un sujet magnétique ? Loin de là ! Ce serait faire preuve d'une blâmable légèreté que d'agir de la sorte, car toute étude sur le Mystère nécessite, plus que toute autre, un contrôle incessant et multiple dont la basé est la pluralité des sujets, mais dont la description détaillée a été donnée ailleurs[28].

B — Rappel d'un défunt

Cette voie d'intercommunication est bien plus facile à utiliser que la précédente, car, outre qu'elle ne fait courir aucun risque au sujet[29], elle ne nécessite qu'un état d'hypnose qui, sans être toutefois superficiel, est néanmoins beaucoup moins profond que dans le cas précédent et ne nécessite aucunement le dédoublement du sujet.

Après avoir procédé à la mise en hypnose, on amène rapidement le sujet au sommeil somnambulique de façon à être bien en rapport avec lui, et l'on continue la magnétisation jusqu'à ce qu'il juge son sommeil assez profond pour l'expérience à laquelle il va être soumis[30].

On lui met alors entre les mains, pour l'aimanter, pour diriger ses recherches dans le mystère, une lettre ou un objet qui, ayant intimement appartenu au défunt, détient encore dans sa propre aura quelques-uns des effluves du disparu, pour l'aider à le retrouver et à entrer en communication avec lui.

Il va sans dire qu'on lui a fait les suggestions de rigueur en pareil cas, c'est-à-dire de ne donner aucune indication, de ne rapporter aucune parole, dont il ne soit absolument sûr. Du reste, il y a des sujets qui disent d'eux-mêmes ne pouvoir faire à telle ou telle question une réponse dont-ils ne sont pas assurés : ce sont d'ordinaire les sujets d'un certain âge qui, ayant longtemps travaillé avec des expérimentateurs sérieux, ont reçu d'eux, en quelque sorte à jet continu, la suggestion de ne pas tromper, et se sont fait, à la longue, une seconde nature de la loyauté même en état d'hypnose.

Donc, dans ces conditions, c'est entendu : le sujet ne trompe pas consciemment l'opérateur ; mais peut-il se tromper ? Peut-il être même trompé par des Entités fallacieuses et, par suite, induire inconsciemment en erreur l'expérimentateur qui agit avec lui ? Cela est indubitable, mais alors c'est au consultant d'agir avec lui comme il agirait avec un médium ordinaire, c'est-à-dire d'établir, par son propre jugement, si les pensées qui lui sont transmises, comme émanant de l'Entité évoquée, correspondent bien à son caractère, à sa mentalité, à tout ce qu'il connaît d'elle.

Comme on le voit, en pareil cas le sujet magnétique est en quelque sorte transformé en sujet médiumnique, avec une différence capitale, cependant, qui élimine bien des causes d'erreurs et qui a été déjà mentionnée plus haut: c'est que l'expérimentateur, agissant magnétiquement, sait où il amène son sujet et, par suite, Jusqu'où peut aller sa confiance en lui, alors qu'il est loin d'en être de même lorsqu'on se trouve en présence d'un médium de qui l'hypnose est produite par une cause complètement inconnue et sur laquelle on ne possède aucun moyen ni d'action ni de réaction.

En résumé, la ligne de conduite à tenir étant la même, au point de vue, s'entend, de l'intercommunication, qu'il s'agisse d'un sujet magnétique ou d'un véritable médium, je ne m'appesantirai pas davantage sur ce point.

Toutefois, une remarque est à faire, qui m'a été suggérée par une toute récente expérience si récente qu'elle n'a encore atteint qu'une partie de sa conclusion et que je la poursuis en ce moment : c'est que, en certains cas, par l'usage de cette voie d'intercommunication, nous pouvons aider les défunts récents à se dégager de la matière qui les enlise, les obnubile et leur est une cause de souffrances. Le fait est assez important pour valoir d'être résumé en quelques lignes.

L'hiver précédent (1923-1924) mourait, à seize cents kilomètres de Paris, un ami que je n'avais jamais vu mais avec qui, par suite de certaines circonstances, je m'étais lié par une correspondance suivie pendant plusieurs années, car j'avais trouvé en lui une intelligence d'élite et un caractère comme je les comprends.

Aussitôt après son décès, sa veuve m'écrivit pour me demander si je ne pourrais pas entrer en relation avec le défunt. A si peu de temps de la mort, la chose me paraissait assez difficile, néanmoins je tentai l'opération, mais le résultat fut celui que j'escomptais : il me fallait attendre un certain temps que l'être fût sorti de l'état de trouble qui suit nécessairement le passage du milieu terrestre au milieu astral ; j'attendis donc quelques mois, jusqu'en décembre (bien que ce laps de temps me parût quelque peu restreint) où je tentai l'expérience.

Parmi les précautions dont je m'étais entouré pour augmenter les chances de la réussite, il en est une qui consistait à prier la veuve, bien que très éloignée de moi, d'unir avec les miennes ses pensées, ses prières et sa volonté, les jours, et aux heures précises, où je ferais l'évocation chez moi, à l'aide du sujet magnétique de premier ordre qu'est Mme Lambert.

Dès la première séance, le sujet aimanté, trouva l'Entité, mais sans pouvoir entrer tout d'abord en communication avec elle: elle était en quelque sorte enfouie dans une sorte de nuage noir, opaque, constitué par des fluides grossiers et presque matériels dont elle ne pouvait arriver à se dégager.

— Cet homme souffre beaucoup, me dit le sujet, et il faudra que nous l'aidions se libérer. En ce moment je ne fais que l'entrevoir dans ce nuage qui l'obnubile et je ne puis encore entrer en communication directe avec lui: je ne sais de lui que ce qu'on m'en dit...

— Qui on?

Les autres.

— Et que vous en disent-ils?

— Qu'il fait des efforts très douloureux pour s'affranchir, car il sait que nous le cherchons et il voudrait tant nous parler !

— Ces efforts qu'il fait, les voyez-vous?

— Oui.

— Comment se traduisent-ils ?

— Par des éclatements lumineux... Tenez ! Avez-vous vu ?

— Quoi donc ?

— Un de ces éclatements... il a été si violent que toute cette pièce en a été illuminée. Vous n'avez rien vu ?

— Hélas ! Avec mes yeux de chair, je suis un aveugle pour ce que vous voyez vous-même.

Une pensée de contrôle ce sentiment, ce besoin de vérification ne me quitte jamais en cours d'expérience me survint alors et je demandai :

— Mais, de tout ce que vous m'affirmez, pouvez-vous me donner une preuve quelconque.

— Oui, cet éclatement de lumière qui a illuminé votre bureau et que n'avez pas vu, sa veuve, elle, l'a perçu.

— A seize cents kilomètres d'ici ?... Et lui-même étant ici?

— Oui. Il a voulu montrer à sa veuve que s'il est ici, sa pensée est près d'elle, et il a fait un violent et douloureux effort pour que cette pensée se manifeste, pour qu'elle la sente à ses côtés.....

Enfin, après un certain temps d'efforts, le sujet annonce :

— Il veut parler... il peut parler.

Et le sujet articule, mais péniblement et d'une voix tout autre:

— Mer...ci...

Puis il est pris d'une crise d'étouffement et s'affaisse. Je fais des passes pour le dégager : la crise continue.

Après une demi heure, le sujet étant très fatigué j'ai mis fin à la séance. Le soir même, j'en écrivais le compte rendu qui partait le lendemain vers Madame X...

Or, quelques jours plus tard, je recevais de cette dame une lettre où elle me disait: «... A l'heure désignée, je me suis recueillie dans une demi-obscurité, la chambre étant seulement éclairée par une petite veilleuse que je tiens jour et nuit allumée dans ma petite chapelle... J'ai prié de tout mon cœur et de toute mon âme, et j'ai senti une grande paix en moi-même...

Durant l'heure de recueillement, j'ai vu tout à coup la chambre s'éclairer vivement ; cela m'a un peu frappée, mais j'ai pensé que cela était dû à un mouvement de la flamme de la veilleuse... »

Ainsi donc m'était donnée la preuve que j'avais demandée, de n'être pas le jouet d'une illusion soit de ma part, soit de celle du sujet que j'employais.

Je m'appliquai, par certains moyens trop longs à détailler ici, à libérer l'Entité des restes de matière qui la retenaient encore prisonnière et l'empêchaient de sortir complètement de l'engourdissement spécial qui, plus ou moins long, plus ou moins profond, accompagne inévitablement toute transition de la vie terrestre à la vie astrale. Et, de fait, à chacune des séances subséquentes, le sujet déclara voir le « nuage » die moins en moins opaque et constater, chez l'Entité, devenue de plus en plus visible pour lui, une facilité croissante à s'affranchir de cet obstacle et à entrer en relation avec lui[31].

Mais alors il se passa deux phénomènes particuliers :

D'une part, lorsque l'Entité parvenait à user du larynx du sujet pour parler, ce n'était qu'avec les plus grands efforts, en mettant un intervalle d'une ou deux secondes entre chaque syllabe, ce qui épuisait positivement le sujet.

D'autre part, la souffrance hyper physique résultant, pour l'Entité appelée, de ses efforts pour se libérer et se communiquer avait sa répercussion matérielle sur le sujet dès que la communication s'établissait entre elle et lui, et cette répercussion se traduisait chez le sujet par une oppression, des spasmes et des suffocations qui, tout en lui faisant courir des risques inquiétants, le rendaient momentanément inutilisable, ce qui me forçait, après quelques minutes, à interrompre l'expérience, laquelle laissait généralement une certaine dyspnée interdisant toute autre tentative : j'étais donc dans l'obligation de réveiller le sujet.

J'en conclus que si l'on tente d'agir sur une Entité trop récemment décédée et, par suite trop entravée encolle par la matière[32] on expose le sujet magnétique que l'on a mis en communication avec cette Entité, à de véritables risques qu'il est préférable d'éviter en ne faisant l'opération qu'un an au moins après le décès de la personne ainsi appelée.

A l'heure où j'écris ces lignes, l'épreuve se poursuit, en bonne voie de réalisation: c'est tout ce que j'en puis dire. Toutefois il convient de noter un détail prouvant à l'évidence que, comme on pourrait y supposer l'existence de ce qu'on appelle un roman subliminal, il faut éliminer de cette affaire toute hypothèse de cette nature de la part du sujet. Voici : Au cours d'une séance, le sujet me dit : Je ressens en ce moment une difficulté qui s'oppose à mes efforts... A ma demande d'explication, il poursuivit: Cela tient à la volonté de Mme X... je ne la sens pas comme d'habitude, autour de nous, et l'Entité a beaucoup de peine à se dégager... Or, quelques jours plus tard, je recevais de Madame X... une lettre relative à cette même séance, et contenant le passage suivant : «... Je me suis enfermée dans une chambre retirée et j'ai commencé mes prières; mais à peine vingt minutes s'étaient écoulées que mon fils aîné est venu et commençait à appeler à haute voix : Maman, il y a du monde et l'on t'attend! J'ai expliqué que je devais rester un peu seule et prier. Mais cela m'a distraite, et j'ai eu peine à fixer encore ma pensée avec force. Cela correspond d'une manière frappante à la remarque du sujet qui a senti que ma volonté était moins forte..... »

D'autre part, l'Entité appelée avait fait, au sujet d'une de ses enfants, certaines recommandations qui, transmises à la mère, m'amenaient cette réponse: Tout ce qu'il dit de l'enfant est stupéfiant, car, en effet, elle est triste, etc.

J'ai donc de telles probabilités de me trouver en présence de l'Entité évoquée, qu'elles confinent à la certitude.

Ces lignes étaient écrites depuis plusieurs mois, lorsque me sont arrivés les épreuves à corriger; mais alors la situation était complètement modifiée : les efforts qu'à chaque séance faisait l'Entité pour se dégager produisaient sur le sujet une répercussion de plus en plus douloureuse et les crises d'étouffement commençaient à devenir inquiétantes par leur intensité et leur durée.

D'autre part le sujet manifestait certaines craintes.

— Il se sert, me disait-il, de vos forces pour se dégager, mais sa volonté de se communiquer est telle que je crains qu'il utilise certaines forces mauvaises qui sont autour de lui.

— Ne le croyez pas : c'était, de son vivant, un être de bonté.

— Oui, mais en lui donnant de vos forces, vous ne lui avez pas rendu sa conscience, et sa conscience est encore dans le trouble : il est incapable de discerner le bien et le mal.

A la suite de cet avertissement, je pris toutes les précautions voulues : ce fut en vain, et, après quelques séances de plus en plus difficiles, il s'en suivit une marquée d'incidents violents : crises cataleptiques, chute du sujet, etc. Et, au réveil, le sujet avait perdu toute mémoire, ne me reconnaissant pas, ne sachant même qui il était lui-même. Des heures se passèrent entre des remises en sommeil en vue de suggestions appropriées et des réveils successifs. Au dîner le sujet mangea automatiquement, puis je le fis coucher après la prise d'une dose d'aspirine. Le lendemain il s'éveilla rentré dans un état presque normal, mais ne se souvenant de rien depuis sa mise en sommeil de la veille, sinon que, toute la nuit il avait été troublé par des bruits si particulièrement violents produits dans mon bureau (auquel sa chambre était contiguë) qu'il y croyait tout briser. Tapage hyperphysique ou hallucination? Quand j'entrai dans mon cabinet, tout y était en ordre.

A la suite de ces faits, je renvoyai la reprise de l'expérience à l'hiver prochain, c'est-à-dire, à une époque où j'ai lieu de supposer que l'Entité appelée aura complètement recouvré sa conscience et cessera de donner lieu à des phénomènes dangereux.

En résumé, quelle conclusion convient-il de tirer de ces faits ? Voici :

Il est relativement aisé, avec un sujet magnétique quelque peu développé, d'entrer en communication avec une Entité astrale, même nommément désignée ; j'ai fait en ce sens nombre d'expériences qui ne laissent subsister aucun doute et cela se comprend facilement, le principal résultat de l'hypnose étant de situer le sujet qui y est soumis sur le plan supérieur, c'est-à-dire précisément sur le plan où évolue l'humanité posthume. Mais, d'autre part, il faut prendre garde d'appeler, en vue de communication, des Entités encore dans l'état de trouble qui suit la mort[33] parce qu'il y a là un danger spécial, à la fois pour l'opérateur et surtout pour le sujet, danger qui résulte de ceci : l'évocation donne des forces à l'Entité appelée mais, comme sa conscience demeure encore obnubilée par le trouble, l'Entité peut mésuser de ces forces au détriment des assistants.

On objectera peut-être, contre ce mode de procéder, que le sujet magnétique devient, en ce cas un véritable médium, et que, par suite la voie magnétique ne diffère pas de la voie médiumnique.

En apparence, il semble en être ainsi, mais, en réalité, il existe entre les deux voies une différence capitale : au cours de l'expérience, le sujet ne cesse pas d'être un sujet magnétique, c'est-à-dire soumis à la volonté de l'opérateur, et l'emprise de l'Entité astrale sur lui n'est jamais que partielle ; de la sorte, en cas de danger, on peut — bien qu'avec une plus ou moins grande difficulté interrompre le rapport et mettre fin à l'emprise, ce qui ne peut avoir lieu lorsque l'on utilise un médium.


Chapitre VI - LA VOIE MAGIQUE

Puisque j'ai exposé les procédés divers ordinairement utilisés pour communiquer entre le monde sensible et le monde psychique, il en est un très peu connu et, ajouterai-je en connaissance de cause, très redoutable, dont je vais donner maintenant l'indication.

J'avouerai que j'ai quelque peu hésité, précisément parce qu'il est redoutable, à le décrire ici ; mais enfin il a déjà été révélé au public par P. Christian[34] sans qui on ne le rencontrerait qu'à la suite d'obsédantes recherches dans de vieux auteurs que feuillètent seuls aujourd'hui les techniciens. Toutefois, bien qu'il décrive le procédé par le menu, Christian a omis consciemment ?... involontairement ?... Qui sait[35] ? D'indiquer la condition primordiale de réussite : j'imiterai en ceci cette réserve, qu'elle ait été voulue ou non, de façon que l'étourdi, l'imprudent ou l'audacieux qui voudra tenter l'épreuve soit obligé de recourir aux sources et que ma conscience n'ait rien à se reprocher.

Quoi qu'il en soit, voici la reproduction du texte de P. Christian :

« L'affection qui nous unit, au delà du tombeau, à la personne regrettée doit être entièrement pure. Le père, la mère, l'enfant, le frère, la sœur, l'époux, l'épouse, les proches parents et les amis intimes sont particulièrement accessibles au vœu de les revoir, si on les considère uniquement comme des êtres transfigurés dans une sphère plus élevée, et qui, dans cette vie nouvelle, prient l'Eternel Tout-puissant de nous rendre dignes de parvenir au même bonheur.

Une autre disposition, non moins nécessaire, c'est l'examen de la conscience ; si l'on a causé quelque tort au prochain, il faut le réparer ; si l'on a d'injustes ennemis, il faut leur accorder dans son cœur un pardon sans réserve ; si l'on a négligé envers Dieu les devoirs d'adoration et de prière, il faut rentrer dans la pratique du culte, suivant la religion que l'on a reçue de ses pères. Ces préliminaires prouvent assez qu'il n'y a dans l'évocation des morts ni sorcellerie ni la moindre apparence de pacte impie ; et ce n'est qu'après s'être ainsi préparé, que l'on peut supporter, sans péril pour la vie et la raison, l'approche du monde invisible.

Le lieu choisi pour l'évocation n'est point indifférent. Le plus propice, assurément, serait l'appartement où l'être regretté a laissé sa dernière trace. Quand cette condition ne peut être réalisée, on doit se procurer, dans quelque campagne solitaire, un lieu dont l'aspect rappelle aussi exactement que possible les mesures et l'orientation de la chambre mortuaire.

La fenêtre doit être masquée par des planches d'olivier, hermétiquement jointes, afin de ne laisser pénétrer aucune lumière extérieure. Le plafond, les quatre parois latérales et le plancher seront revêtus d'une tenture de soie vert émeraude, que l'évocateur ajustera lui-même avec des clous de cuivre, sans recourir à l'aide d'aucune main étrangère, parce que, dès ce moment, lui seul doit entrer dans ce lieu réservé qui prend le nom d'oratoire.

Il faut ensuite recueillir les meubles dont la personne aimée faisait usage, les objets qu'elle affectionnait et qui ont reçu ses derniers regards. On les range dans l'ordre qu'ils occupaient au moment de la mort. Si l'on ne possède plus ces souvenirs, il faut au moins se procurer ou faire peindre, avec la plus fidèle ressemblance possible, un portrait en pied de la personne, vêtue du costume et des couleurs qu'elle portait dans les derniers jours de sa vie. Ce portrait doit être adossé du côté de l'Orient, fixé par des attaches en cuivre, et couvert d'un voile de soie blanche. On le surmonte d'une couronne composée des fleurs que préférait la personne représentée.

Devant ce portrait, on dresse un autel de marbre blanc, soutenu par quatre colonnettes terminées en pied de taureau. Sur la table de l'autel doit être incrustée une étoile à cinq pointes, formée de lames de cuivre très pur, et tracée d'après le modèle qu'offre Anaél, génie planétaire de Vénus. Le centre de cette étoile, entre les lames, doit être assez large pour entourer le pied d'un réchaud de cuivre, en forme de coupe, contenant des fragments desséchés de bois d'aulne et de laurier. On pose près du réchaud, une navette pleine d'encens.

Une autre étoile à cinq pointes sera figurée par des lignes parallèles (bleu céleste, jaune d'or, vert émeraude et rouge pourpre) sur une peau d'agneau mâle, blanche et sans tache, que l'on étend sous l'autel.

Au milieu de l'oratoire se place un trépied de cuivre, de forme triangulaire, portant un réchaud semblable au précèdent et contenant des fragments très secs de bois d'olivier.

Près du mur, du côté du Midi, l'on met un haut candélabre en cuivre, destiné à recevoir un cierge de cire blanche très pure, qui doit seul éclairer le mystère de l'évocation.

La couleur blanche de l'autel, de la peau d'agneau et du voile est consacrée à Gabriel, archange planétaire de la Lune, et génie des mystères. La couleur verte des tentures et le cuivre appartiennent au génie de Vénus.

L'autel et le trépied sont entourés, chacun, d'une chaîne de fer aimanté et de trois guirlandes composées de fleurs et feuillage de myrte, d'olivier et de rosier.

Enfin, du côté de l'Occident et faisant face au portrait, il faut disposer un dais également drapé de soie vert émeraude, et reposant sur deux colonnettes triangulaires, faites en bois d'olivier et revêtues d'une feuille de cuivre très pur. Entre le mur et chaque colonnette, du côté du Nord et du côté du Midi, la tenture doit tomber à longs plis jusqu'à terre, de façon à former une sorte de tabernacle ouvert du côté de l'Orient. Au pied de chaque colonnette, se place un sphinx accroupi, sculpté en marbre blanc comme l'autel. Le sommet de la tête de chaque sphinx est creusé pour recevoir un réchaud de cuivre, destiné à brûler des parfums. C'est sous ce dais que se manifestera l'apparition, et il faut se souvenir que l'évocateur doit se tourner vers l'Orient pour prier et vers l'Occident pour évoquer.

Avant d'entrer dans ce petit sanctuaire consacré à la religion des souvenirs, l'évocateur se revêt d'une robe bleu d'azur, attachée par des agrafes de cuivre dans chacune desquelles est enchâssée une émeraude. Sur la tête, il porte une tiare entourée d'un cercle fleuronné de douze émeraudes, et d'une couronne de violettes. Il applique sur sa poitrine le talisman de Vénus, suspendu à un ruban bleu d'azur. Au doigt annulaire de sa main gauche, il passe un anneau de cuivre, enchâssé d'une turquoise. Il marche avec des souliers bleus d'azur, et se munit d'un éventail aux plumes de cygne, pour écarter, au besoin, la fumée des parfums.

L'oratoire et tous les objets que je viens de décrire doivent être consacrés un vendredi, pendant l'une des heures qui appartiennent au génie de Vénus. Cette consécration se fait en brûlant des violettes et des roses dans un feu de bois d'olivier. On a dû ménager, dans quelque partie de l'oratoire, un conduit ventilateur qui livre passage à l'exhalaison des vapeurs, mais sans laisser filtrer la lumière du dehors.

Lorsque ces préparatifs sont achevés, l'évocateur s'impose vingt-et-un jours de retraite, qui commencent par l'anniversaire de la naissance ou de la mort de la personne aimée. Pendant cet espace de temps, il évitera de donner à qui que ce soit la moindre des marques d'affection que recevait de lui l'être défunt; il se maintiendra dans une chasteté absolue d'actes et de pensées ; il ne fera chaque jour, qu'un seul repas, composé de pain, vin, racines et fruits. Ces trois conditions sont indispensables au succès de l'évocation, et leur accomplissement réclame une profonde solitude.

Chaque jour, un peu avant minuit, l'évocateur se revêtira du costume consacré. A minuit sonnant il entrera dans l'oratoire en portant à la main droite un cierge allumé, et, de l'autre, un sablier. Le cierge sera placé sur le candélabre, et le sablier, sur l'autel, marquera l'heure. L'évocateur procédera ensuite au renouvellement de la couronne de fleurs et des guirlandes. Puis il découvrira le portrait et, immobile devant l'autel, c'est-à-dire tourné vers l'Orient, il repassera doucement et lentement dans son cœur tous les souvenirs qu'il conserve de la personne aimée.

Lorsque le récipient supérieur du sablier sera épuisé, l'heure de méditation sera finie. L'évocateur allumera à la flamme du candélabre les petits fragments de bois d'aulne et de laurier que contient le réchaud placé sur l'autel ; puis prenant dans la navette une pincée d'encens, il en jettera trois fois sur le feu, en prononçant ces paroles : « Gloire au Père de la vie universelle, dans la splendeur des hauteurs infinies, et paix dans le crépuscule des profondeurs sans fin, aux esprits de bonne volonté. »

Il revoilera ensuite le portrait, et, reprenant son cierge à la main, il sortira de l'oratoire en marchant lentement jus­qu'au seuil. Le même cérémonial aura lieu tous les soirs, à la même heure de minuit, pendant les vingt premiers jours de la retraite. La couronne suspendue au portrait, ainsi que les guirlandes qui entourent l'autel et le trépied, doivent être renouvelées à chaque visite. Les fleurs et feuillages flétris seront brûlés dans une chambre voisine de l'oratoire, et l'évocateur y conservera leur cendre, à laquelle il réunira les cendres recueillies après chacune des visites qui suivront.

Le vingt-et-unième jour étant arrivé, l'évocateur fera son possible pour n'avoir besoin de communiquer avec qui que ce soit. S'il ne peut absolument se dispenser de quelque entrevue, il devra ne point parler le premier et renvoyer toute affaire au lendemain. A midi sonnant, il dressera, dans l'oratoire, une petite table ronde, couverte d'une nappe de lin d'une parfaite blancheur et qui n'ait jamais servi. Il y posera deux calices de cuivre, un pain entier, et un flacon de cristal contenant du vin très pur. Le pain sera rompu, non coupé ; le vin sera partagé dans les deux calices. L'évocateur offrira à la personne défunte la moitié de cette communion mystérieuse qui sera, ce jour-là, son unique aliment. Il mangera debout en silence, l'autre moitié, devant le portrait voilé, et à l'unique clarté d'un cierge, puis il se retirera comme à l'ordinaire, en reculant jusqu'au seuil. Le pain et le calice offerts doivent être laissés sur la table.

Le soir venu, à l'heure solennelle, l'évocateur apportera dans l'oratoire du bais de cyprès bien desséché, qu'il allumera sur l'autel et sur le trépied. Il jettera sur la flamme de l’autel trois pincées d’encens, en l’honneur de la Puissance suprême qui se manifeste par l’Intelligence perpétuellement active et par la Sagesse absolue. Quand le bois des deux réchauds sera réduit en charbons, il réitérera la triple offrande de l'encens sur l'autel, et en jettera sept fois sur le feu du trépied, en l'honneur des sept génies médiateurs qui accomplissent les divines volontés. Pendant chaque évaporation du parfum sacré, il répétera la doxologie « Gloire au Père de la vie universelle, etc. » Ensuite, se tournant vers l'Orient, il invoquera Dieu par les prières du culte que professait, vivante, la personne évoquée.

Après ces prières se tournant vers l'Occident, il allumera les réchauds posés sur la tête de chaque sphinx et quand le charbon de cyprès sera en pleine combustion, il le couvrira de violettes et de roses parfaitement desséchées. Puis il éteindra le cierge qui éclaire l'oratoire et, se mettant à genoux devant le dais, entre les deux colonnes, il parlera mentalement à la personne aimée, avec affection, avec foi. Il la suppliera de se montrer et renouvellera sept fois cette adjuration mentale, sous les auspices des sept génies providentiels, en s'efforçant d'élever son esprit au-dessus des faiblesses de la nature humaine.

Enfin l'évocateur les yeux fermés et la face couverte de ses deux mains, appellera à haute voix, mais avec douceur, la personne évoquée, en prononçant trois fois tous ses noms.

Quelques instants après le troisième appel, il étendra lentement ses bras en croix, et, ouvrant les yeux, il verra, devant lui l'être aimé, parfaitement reconnaissable, c'est-à-dire sa substance éthérée qui s'est séparée du corps terrestre et mortel, et que les maîtres kabbalistes nomment périsprit (enveloppe fluidique de l'âme)[36], conservant la forme humaine affranchie de ses infirmités, et les traits distinctifs par lesquels se manifeste l'impérissable individualité de notre essence. L'évocateur et la personne évoquée, pourront s'entretenir et se comprendre en silence par une mutuelle et mystérieuse transmission de leur pensée.

L'âme évoquée donne des conseils ; elle révèle parfois des secrets dont la connaissance peut être utile au bonheur des personnes qu'elle a aimées pendant sa vie terrestre. Mais elle ne répond à aucune question qui aurait pour objet la satisfaction d'une convoitise ou d'une passion sensuelle : elle ne découvre point les trésors cachés, ni les secrets d'autrui ; elle se tait sur les mystères de l'existence nouvelle dans laquelle elle est entrée. Il peut arriver cependant qu'elle se déclare heureuse ou punie, et, dans ce dernier cas, elle demande des prières ou des actes religieux qu'il faut accomplir fidèlement. Elle indique enfin le temps où l'évocation pourra se renouveler.

Quand elle a disparu, l'évocateur doit se retourner du côté de l'Orient, rallumer le feu de l'autel et faire une dernière offrande d'encens. Puis il détache la couronne et les guirlandes, reprend son cierge et se retire en faisant face à l'Occident, jusqu'à ce qu'il soit sorti de l'oratoire. Son dernier devoir est de brûler les derniers débris de feuillage et de fleurs. Leur cendre, réunie à toutes les cendres recueillies pendant les vingt jours précédents sera mêlée avec de la semence de myrte, puis portée et enfouie secrètement dans un champ, à une profondeur que n'atteigne point le soc de la charrue.

Les conditions cérémonielles de l'évocation sont, comme on le voit, parfaitement simples; celles de l'aptitude morale sont plus difficiles à réaliser, mais elles ne dépassent point les forces humaines. La doctrine théurgique a prévu le cas d'insuccès ; elle conseille de recommencer l'épreuve à l'époque du second anniversaire, en y apportant plus de précaution et de recueillement, et elle affirme qu'une troisième tentative n'est jamais sans résultats, à moins que l'évocateur ne soit dominé par quelque vice invétéré, devenu en lui comme une seconde nature.

J'ai reçu à cet égard, je le répète, de nombreuses et graves affirmations ; mais je laisse le champ libre aux contradicteurs, me bornant à leur dire : « Avant de nier péremptoirement, essayez l'expérience. Tous les miracles sont promis à la foi. La foi est l'audace d'une volonté qui n'hésite point dans les ténèbres, et qui marche vers la lumière à travers toutes les épreuves et en surmontant tous les obstacles. La volonté est le suprême arcane de la Haute magie » .....

Mais, dira quelque lecteur, voilà qui, malgré les affirmations de l'auteur, est assez compliqué et méticuleux.

Il est certain que la marche générale et technique de l'ensemble, la minutie et la précision de certains détails exigent que l'opération soit dirigée par un magiste au courant des dogmes hyperphysiques et non par un quelconque premier venu; mais avez-vous jamais vu une délicate expérience de chimie ou de bactériologie remise à la conduite d'un ignorant ?

Et puis, objectera quelque autre, toutes ces gemmes et ces soieries... Ceci n'est pas à la portée de toutes les bourses.

Certainement le coût doit être très élevé pour qui suit à la lettre toutes ces prescriptions; mais pour un opérateur au courant de la théorie des correspondances occultes, il est très facile d'apporter aux indications données toutes les modifications nécessaires sans n’aucunement mettre en jeu la réussite. La minutie et le prix de tous les détails et accessoires d'une opération hyperphysique n'avaient d'autre but, chez les vieux maîtres, que de décourager les fragiles volontés et d'éloigner les caractères légers.

Enfin, où se trouve, en tout ceci, ce danger que vous avez plus haut qualifié de « redoutable » mais qui n'apparaît nulle part dans toute cette description ?

J'étonnerai peut-être beaucoup mon interlocuteur en lui déclarant tout naïvement : « Je n'en sais rien, et c'est, pour moi, précisément ce qui le rend redoutable. » En effet, dans toute expérience métapsychique ou hyperphysique, un danger connu, quelque grand qu'il soit, peut toujours être au moins neutralisé par des précautions appropriées ; mais que faire, quelle garantie prendre contre un péril certain, mais imprécis, et dont la menace seule est évidente ?

Or, si l'évidence de cette menace ne vous apparaît pas de piano, écoutez ceci :

Vers 1908, une femme vint à moi, qui portais en soi une inguérissable douleur : elle pleurait la mort d'un fils unique. Cette femme, dont je puis parler maintenant parce qu'elle aussi est morte, avait débuté dans la vie sous les auspices du plus absolu bonheur; sa famille occupait une haute situation aux Tuileries, et elle-même, enfant, avait partagé les jeux du prince impérial. Possédant une grande fortune, elle avait épousé un personnage de premier plan qui l'avait laissée veuve avec un fils en bas âge, sur la tête de qui elle avait concentré toutes ses affections et tous ses espoirs; et ce fils qui était désormais l'unique but de sa vie, sa seule raison de vivre, un stupide accident le lui enlevait à l'âge de vingt ans...

Et cette mère éplorée vint à moi, me suppliant de lui faire revoir son fils.

J'hésitai longtemps, je l'avoue, car, outre que la difficulté de l'opération était grande, je me demandais, non sans anxiété, si cette épreuve, au lieu d'apporter à la mère le soulagement espéré, ne lui ferait pas plus de mal que de bien. Et, d'autre part, je n'avais pas alors, sous la main, un médium à matérialisations assez puissant dont je pusse me servir pour procurer un allègement à cette mortelle douleur.

Mais le chagrin de cette mère était si intense et si troublant, et sa volonté si fermement tenace que je fus amené progressivement à envisager la possibilité de mettre en œuvre l'opération qui vient d'être décrite; et, pendant deux mois, j'étudiai les voies et moyens pour réaliser cette formidable expérience dont je ne voyais alors que les dangers purement matériels et moraux dangers qu'il était relativement facile sinon d'éliminer complètement, au moins de neutraliser dans certaine mesure.

Heureusement pour moi, les études expérimentales que je poursuis sur les côtés obscurs de la nature me font utiliser couramment de bons sujets magnétiques au moyen desquels j'entre assez facilement en communication avec le Mystère.

Quand tous mes préparatifs furent établis théoriquement en vue de cette opération de théurgie, j'eus la pensée, avant de les réaliser pratiquement, d'interroger sur la possibilité de réussite une des Entités qui m'aident le plus habituellement en surveillant les effets, sur le plan voisin, des expériences que j'établis de ce côté-ci du voile. Et une très curieuse conversation s'engagea alors entre cette Entité et moi. Oui, tu réussiras, me dit-elle, parce qu'il y a de ces modes d'appel auxquels ne peut résister aucun invisible tant qu'il est encore uni à la terre par les liens de sa dernière vie, mais tu sauras ensuite ce que cela t'aura coûté !

— Que voulez-vous dire ? Je ne comprends pas cette menace, surtout venant de vous qui m'aidez journellement dans mes expériences.

— Il ne s'agit pas là d'une expérience ordinaire de recherches, mais d'un acte sciemment opposé aux lois qui dominent le monde.

— Vos paroles sont pour moi incompréhensibles, car enfin il arrive constamment aux désincarnés de se manifester aux vivants par voie médiumnique ou autrement. Et vous-même, en ce moment, ne faites pas autre chose. Je cherche en vain, en ceci, et ma faute et ma responsabilité; je ne les vois pas.

— Parce que ne se manifestent ainsi à vous par voie médiumnique que ceux d'entre nous qui le peuvent normalement, et qui, le pouvant, le veulent. Or, l'évocation que tu prépares FORCERA l'être ainsi appelé, qu'il le veuille ou non, que cela soit ou non dans ses possibilités normales du moment, à se replonger dans la matière dont on a tant de peine à se libérer, et à perdre peut être, par ta faute, tout le bénéfice de ses efforts antérieurs. Et cela, ça s'appelle un crime. As-tu pensé, de plus, que cet être, que tu te disposes à faire régresser vers l'enlisement de la matière, est peut-être en ce moment engagé dans une voie évolutive, que ton acte, en le ramenant sur terre, le contraindra à interrompre sinon à abandonner ? Or, ceci est plus qu'un crime : c'est un sacrilège ! Maintenant, tu es averti: vois ce que tu dois faire, mais je te le répète: si tu persistes, tu verras ensuite ce qu'il t'en coûtera sur terre, et de quel châtiment tu auras à payer plus tard l'acte effroyable que tu prépares...

Inutile de dire que, devant une aussi formidable menace qui pouvait se réaliser non seulement sur ma vie présente mais encore sur ses suites posthumes, je me suis abstenu. J'ai cherché un médium à matérialisations de qui la trance laissât à l'être évoqué la liberté de se révéler dans la mesure qu'il jugerait lui-même possible, et j'ai développé ce médium en vue de l'épreuve demandée.

Ce que fut cette expérience, je n'ai pas à le raconter ici: il me suffira de dire que jamais, maintenant que je suis averti, je ne la réitérerai, ayant vu, en un instant critique de cette soirée, engager à la fois et la raison de la mère et la vie du sujet...

L'homme pourra-t-il jamais arriver à seulement soupçonner combien sont formidables certaines forces du Mystère qui enserrent sa faiblesse terrestre ? Des forces intelligentes, oui, mais si redoutablement, si effroyablement puissantes que la plus simple prudence ordonne d'éviter tout contact avec elles...


Chapitre VII - LA VOIE MÉCANIQUE

De cette voie, je ne dirai que peu de chose parce que son usage n'a pas encore pénétré dans le public. En effet, les instruments qu'elle utilise ne sont pas au point et ne servent guère pour l'instant, qu'à leurs constructeurs ; mais comme, demain peut-être, l'appareil idéal pour la suivre peut être trouvé, et donner toute satisfaction, je suis contraint d'en dire ici quelques mots.

La voie médiumnique, à côté d'avantages certains, présente deux grands défauts.

Le premier, que j'ai signalé plus haut, est que la transe du médium qui est une véritable hypnose provient de sa magnétisation par une Entité astrale or si, lorsque nous magnétisons un sujet, nous savons exactement où nous le conduisons, il est déjà difficile de le suivre lorsqu'il est mis en hypnose par un autre opérateur que nous-mêmes ; encore pouvons-nous recevoir de cet autre opérateur tous renseignements nécessaires ; mais lorsque le magnétiseur est un être du Mystère, nous n'avons plus aucun critérium de la situation, et nous sommes forcés de suivre le médium sans savoir où il nous emmène, sans connaître le degré de véracité de ses paroles...

Le second défaut du médium, c'est que, comme l'indique son nom, il est intermédiaire entre le plan astral et le plan physique, et que, fatalement, dans chacune de ses communications se rencontre un peu de lui-même, sans que nous puissions établir le départ certain entre ce qui provient de lui et ce qui nous est simplement transmis par son moyen.

Dès longtemps, des chercheurs se sont mis à l'œuvre et ont tenté d'établir un appareil purement mécanique qui éliminât ces deux causes d'erreur en éliminant le médium lui-même, et, à la suite de leurs travaux, la théorie en paraît actuellement assez bien établie pour que l'instrument ne tarde pas longtemps à être construit.

En effet, comment s'opère l'intercommunication au moyen d'un médium ? Cela a été indiqué plus haut : le médium exté­riore sa force odique, c'est-à-dire vitale avec cette force vitale du médium, qui est susceptible d'actionner la matière, l'Entité de l'Au-delà, qui veut se communiquer, combine sa propre force astrale et parvient ainsi à actionner médiatement la matière, qu'elle constitue les organes phonétiques du sujet ou n'importe quel autre objet.

L'Entité, pour se manifester, a donc besoin de force vitale ; cette force vitale, où la trouver, en dehors d'un être vivant ? Tout simplement dans l'électricité qui constitue une force vitale très grossière, à la vérité, mais pouvant néanmoins, l'expérience l'a démontré, être utilisée par les Etres du Mystère pour arriver à leurs fins.

Tout instrument mécanique d'intercommunication doit donc être basé avant tout sur la création d'un champ électrique approprié.

Ce point acquis, comment mettre en œuvre l'énergie ainsi développée ? Ici les systèmes diffèrent, mais le plus rationnel semble bien être celui qu'ont imaginé deux ingénieurs hollandais, MM. Matta et Zaalberg van Zeist.

La machine de ces inventeurs est trop compliquée tel est son défaut pour pouvoir être décrite par le détail ; aussi n'en indiquerai-je ici que le principe essentiel.

A la suite d'expériences très remarquables et que j'ai déjà eu l'occasion de relater ailleurs[37] ces deux expérimentateurs ont constaté que l'Homme-force[38] a la possibilité de dilater et de contracter à sa volonté l'agrégat fluidique qui constitue son corps.

Si donc on enclot un Homme-force dans un récipient dont les parois sont impénétrables à l'air, mais rempli d'air à la pression normale, et communiquant avec un tube de verre obturé dans son milieu par un index mobile, il est évident qu'en se dilatant ou en se contractant il diminuera ou augmentera la pression de l'air ambiant et fera mouvoir l'index dans un sens ou dans l'autre.

Si maintenant on suppose cet index modifié en conséquence en relation avec une roue munie de vingt-quatre dents dont chacune correspond à une lettre de l'alphabet, il est facile de comprendre que, par ses dilatations et ses contractions successives, l'Homme-force peut amener telle ou telle lettre devant une fenêtre ménagée en avant de la roue dentelée, et où tout assistant la pourra lire aisément.

De cette façon se trouvent à la fois éliminés et le médium et tous les inconvénients qui lui sont inhérents.


CONCLUSION

Je viens d'examiner successivement tous les procédés existant actuellement pour entrer en relation avec le Mystère... Cela veut-il dire que chaque lecteur doit trouver en ces descriptions un évident encouragement à s'engager dans une de ces voies?

Oui et non suivant le point de vue auquel on se place.

Il est évident, en effet, que la voie animique, la voie conscientielle, ne saurait être trop encouragée: c'est le procédé normal à l'aide duquel chacun de nous peut s'entretenir avec ses chers disparus, et, aux heures de découragement ou simplement de lassitude, recevoir, dans l'intimité de son être, le réconfort et l'encouragement que peuvent lui apporter les Entités du Mystère.

La voie médiumnique, quand elle conduit à simplement interroger des médiums, expose, comme je l'ai montré au cours de ces pages, le consultant à des erreurs dont, souvent, il ne voit même pas la possibilité ; si l'on entreprend de s'y engager soi-même en développant une faculté personnelle, il peut en résulter des risques neuropathiques ou cérébraux assez rares d'ailleurs, mais toujours possibles.

Si l'on va plus loin, plus haut, il faut ne tenter l'aventure que si l'on est sûr de soi, si l'on sent que le cerveau, solidement fixé dans le crâne, n'a aucune tendance à s'effriter en lambeaux sous un orage de folie, car, plus loin, plus haut, on se heurte presque inévitablement à ce que les vieux maîtres de l'hermétisme ont appelé « le dragon du seuil ».

Qu'est-il donc ce dragon du seuil ?

Il est, en occultisme un adage bien connu, au dire duquel l'astral n'aime pas les intrus; par suite, il a confié le soin de son inviolabilité à un incorruptible gardien qui s'attaque à quiconque se présente pour violer la sainteté du Mystère, et qui tue impitoyablement les curieux, les faibles, tous ceux en un mot, qui ne peuvent ou ne savent lutter contre lui et le vaincre.

Je m'explique.

Parmi tous les expérimentateurs de l'Au-delà, il n'en est aucun absolument aucun qui, ayant pénétré d'une façon ou d'une autre par delà le voile, n'ait contemplé, au moins partiellement, les splendeurs que revêt la vie dans la mort. Et quand ceux-là sortent de ce qui fut pour eux la merveilleuse vision d'un instant et reprennent contact avec la brutale hostilité de la matière, il se présente sur leur chemin des heures de découragement et de désespérance où ils prennent en haine la vie terrestre et appellent de tous leurs désirs, de tous leur vœux, de tout leur acharnement, la vie supérieure qu'ils ont un moment entrevue... Et, dans ces heures d'abandon, le dragon du seuil les hante et veut les contraindre à le suivre... Le dragon du seuil, qui revêt bien des formes, parmi lesquelles celles multiples de la folie, prend alors le nom de suicide.

Et il n'est personne, parmi les curieux de l'astral, qui n'ait vécu ces heures troublantes, La plupart les énergiques en sortent plus forts, mieux trempés pour la, lutte et se contentent de désirer leur heure; mais il en est aussi les pusillanimes qui ont succombé au mirage... Ceux-là Combien sont-ils dans le passé ? Qui les comptera ? ont cru atteindre avant le temps le but de leurs appétences et de leurs convoitises et n'ont commis qu'un crime qui les en éloigne... Ils sont relativement peu, dira-t-on. Je répondrai : Ils sont encore trop nombreux !.....

Versailles, Décembre 1924.

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION.. 3

Chapitre I - LA VOIE ANIMIQUE.. 4

Chapitre II - LA VOIE ONIRIQUE.. 8

Chapitre III - LA VOIE MÉDIUMNIQUE.. 11

Chapitre IV - LA VOIE ECTOPLASMIQUE.. 18

Chapitre V - LA VOIE MAGNÉTIQUE.. 21

Chapitre VI - LA VOIE MAGIQUE.. 31

Chapitre VII - LA VOIE MÉCANIQUE.. 37

CONCLUSION.. 39


[1] Métaphysique des mœurs, 1 vol. Leipzig, 1340.

[2] V. la Vie Posthume selon la psychophysiologie, la psychologie expérimentale et la physique, du même auteur (1 vol. grand in-8", Paris, 1923) dont la présente brochure constitue, en quelque sorte, un chapitre supplémentaire.

[3] Génie du Christianisme, 5 vol. in-8, Paris, 1802.

[4] Essais.

[5] On sait maintenant que la pensée est d'ordre matériel, bien que d'une matière particulièrement quintessenciée, puisque son élaboration cause la destruction physiologique de cellules cérébrales, et que son énergie réduit les sels d'argent (photographie de la pensée), deux phénomènes — entre bien d'autres — qui ne sauraient se réaliser si la pensée était de nature spirituelle.

[6] Ne pas confondre le rêve vague et fou, issu d'une fâcheuse digestion ou d'un événement -qui nous a frappés à l'état de veille, avec le songe qui constitue souvent une prémonition suggérée par une force extérieure.

[7] Œuvres philosophiques, 4 vol. in-8., Paris, 1841, t. II, p. 213 seq.

[8] Il est à remarquer, en effet, que ce même état d'inertie et de passivité est absolument nécessaire chez les sujets magnétiques que l'on se prépare à endormir, et qu'il faut le produire artificiellement chez ceux qui se soumettent endormir, et qu'il faut la produire artificiellement chez ceux qui se soumettent pour la première fois à la magnétisation. A remarquer encore que les médiums en transe se trouvent invariablement plongés dans le même état.

[9][9] V. cependant Les rêves et les moyens de les diriger, (1 vol. in-8, Paris, 1867) sans nom d'auteur (d'Hervey de Saint-Denis).

[10] Méthode de dédoublement personnel, du même auteur, 1 vol. in-8, Paris 1910.

[11] Edition française, 1 vol. in-8, Paris, 1893.

[12] Il est même curieux de relire à ce sujet les livres d’Eliphas Lévi qui, en maints endroits de ses ouvrages, mais surtout dans sa Science des Esprits (1 vol. in-8, Paris, 1865) met les spirites en garde contre de nombreux phénomènes regardés alors très généralement comme médiumniques.

[13] V. l'Ame humaine, du même auteur (1 vol. in-12, Paris).

[14] Encore cette âme sensitive semble-t-elle bien abandonner, dans cette profonde modification qu'est la mort, la partie d'elle-même qui détient la sensibilité purement physique, et dont elle n'a que faire sur le plan voisin.

[15] V. La voie Ectoplasmique.

[16] L'usage du guéridon — ainsi du reste que celui du Oui-Jà et de l'écriture mécanique dont il va être question plus loin — ressortit à la médiumnité motrice.

[17] Beaucoup de fraudes, chez les médiums, proviennent de l'affaiblissement ou de la disparition de leur faculté, parce qu'ils veulent, malgré toute impossibilité métapsychique, générer quand même leurs phénomènes habituels.

[18] Il existe plusieurs exemples de brusque dissolution du fantôme produite par le subit éclatement d'une allumette (lumière blanche) provenant du fait d'un malintentionné ou même d'un étourdi, et ayant causé au médium du moment une incurable cécité.

[19] La lumière anactinique est sans effet sur la substance fantomale.

[20] La Vie posthume d'après la psychophysiologie, la psychologie expérimen­tale et la physique, du même auteur (1 vol. grand in-8, Paris, 1923.

[21] Je dis bien magnétique et non hypnotique, J'ai eu l'occasion de l'expliquer ailleurs : tous les procédés hypnotiques sont brutaux, parce qu'ils agissent par le choc nerveux or, le choc nerveux fait déjà perdre au sujet une partie de ses forces psychiques, alors qu'il n'a pas de trop de la totalité de ces mêmes forces pour supporter efficacement la désagrégation partielle de son être et sa situation dans des conditions vitales très critiques pour ne pas dire dangereuses; d'autre part, les procédés hypnotiques, étant naturelle­ment basés sur la brutalité (coup de gong ou de pistolet, lumière subite et aveuglante, etc.) ne peuvent susciter, chez le sujet, pour l'opérateur, qu'un sen­timent de crainte qui devient rapidement de la terreur, au lieu de ce sentiment de confiance affectueuse et dévouée sans laquelle on ne peut aboutir à rien de sérieux. Qu'il me soit permis, à l'appui, de citer une anecdote inconnue :

Une jeune femme vint un jour se jeter aux pieds du Colonel de Rochas, le suppliant de la sauver de l'emprise des hypnotiseurs de la Salpetrière qui faisaient d'elle — elle le sentait — une véritable loque humaine.

- Mais, interrogea le Maître, pourquoi y allez-vous ?

- J'y suis allée une fois pour une consultation, et, depuis lors, c'est comme une force invincible qui me contraint, malgré toute ma volonté, malgré ma résistance, à y aller aux jours et heures qui me sont indiqués.

Le Colonel comprit que cette femme obéissait à une suggestion ; il l'endormit magnétiquement pour lui donner la suggestion contraire et lui permettre de résister. Or, cette malheureuse ressentit un tel bien-être du sommeil magnétique qu'elle continua à travailler avec M. de Rochas, et, de cette femme de qui la Salpetrière n'avait fait qu'une malade, le Maître fit le brillant sujet Lina, qu'il étudia tout particulièrement dans son ouvrage Les Sentiments, la Musique et le, Geste (1 vol. gram in-8, Grenoble, 1900).

[22] Le procédé que j'indique en détail est celui que j'utilise moi-même. J'ignore s'il en existe d'autres magnétiquement parlant; en tous cas, il ne peut y on avoir de plus prudent que celui-ci et, dans toutes ces expériences transcendantales la prudence, même la plus exagérée, est de la nécessité la plus absolue.

[23] V. dans L'âme humaine (1 vol. in-12, Paris, 1921) du même auteur, les procédés de dédoublement.

[24] Il prend très généralement alors, suivant que sa souplesse et son âge le lui permettent, la position caractéristique du fœtus dans le sein de sa mère jambes repliées et bras croisés sous le menton pour se détendre progressivement, à mesure qu'on le rapproche de l'époque de la conception.

[25] Il est a remarquer que, lorsqu'on ramène le sujet à la présente époque en lui faisant suivre en sens inverse le chemin parcouru, il importe de ne pas précipiter la marche et de lui laisser, à chaque stade indiqué, de même qu'à l'aller, le temps nécessaire pour se fixer à la période voulue, sinon il revient: à lui tout étourdi et généralement impropre, pour le reste de la séance, à. toute recherche ou expérimentation.

[26] J'ai a peine besoin de dire que, pour risquer des expériences de telle nature, j'ai recours de la façon la plus exclusive, uniquement à des sujets de la moralité de qui je suis absolument sûr. J'ignore ce qui pourrait se passer si l'on utilisait des sujets sympathisant avec les entités mauvaises qu'ils rencontrent dans le Mystère.

[27] La Calice médiumnique est, je l'ai déjà dit, une véritable hypnose causée par la magnétisation des entités astrales.

[28] V. La Vie posthume, déjà citée et L'Ame humaine, 1 vol. in-12, Paris, 1(20, où se trouvent indiqués en détail tous les procédés de contrôle que j'ai utilisés au cours de mes recherches expérimentales.

[29] Voir cependant ce qui va être dit plus loin

[30] L'école de la Salpêtrière a établi en doctrine absolue que, à mesure que s'approfondit le sommeil, les trois états (léthargie, somnambulisme et cata­lepsie) se suivent et se succèdent invariablement les uns aux autres : c'est —entre beaucoup d'autres de cette école — une erreur, basée sur l'autosuggestion des opérateurs, et que ne partage pas l'école de Nancy. Au reste, en fait d'hyp­notisme, les seuls ouvrages de l'école de Nancy méritent créance, surtout - quand elle proclame avec l'autorité de Bernheim : « Il n'y a pas d'hypnotisme!»

[31] Cf. l'enseignement du catholicisme sur le soulagement et la libération des âmes du purgatoire.

[32] L'âme vitale ou double aithérique survit environ huit jours au corps devenu cadavre: pendant cette période, on peut tenter l'opération dont s'agit, mais à mon avis, en faisant beaucoup souffrir l'être ainsi gêné au début de sa transformation. Ensuite, il tombe dans un état de trouble profond dont il ne sort que progressivement en se libérant de la matière: il vaut mieux attendre, pour faire l'évocation, sa libération complète et du trouble et de la matière.

[33] Sauf pendant les premiers jours immédiatement consécutifs au décès, où le double aithérique (âme vitale) subsiste encore et facilite dans une certaine mesure les rapports terrestres ; encore, en pareil cas, vaut-il mieux s'abstenir, parce qu'on n'est pas sûr de ne pas retarder ou fausser l'évolution posthume du défunt.

[34] Histoire de la magie (1 vol, grand in-8, Paris, s d — épuisé).

[35] Au cours de la publication de son Histoire de la magie, P. Christian, s'est brouillé avec son éditeur: par suite, dans la correction des épreuves, il a éliminé du livre certaines indications primordiales dont l'absence interdit de se servir de l'ouvrage comme il convient. C'est ainsi que, dans la reproduction qu'il donne des Mathématiques occultes de Firmicus Maternus, et des Commentaires de Junctin de Florence, qui constituent la base de la pratique astrologique, il a omis certaines clés sans lesquelles il est assez difficile d'utiliser sa reproduction. Peut-être en fut-il de même en ce qui concerne la partie dont nous allons avoir à nous occuper ici.

[36] Ici, P. Christian commet une erreur : ce sont les spirites qui appellent périsprit l'âme, enveloppe de l'esprit, qui constitue le fantôme ; les kabbalistes désignent cet élément sous le nom de corps astral.

[37] V. notamment la Vie posthume d'après la psycho-physiologie, la psychologie expérimentale et la physique, citée supra.

[38] C'est par ce vocable — plus scientifique — qu'ils désignent l'Entité désincarnée.

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